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vendredi 27 novembre 2009

Journal de Mister C., 9 : Onirie nasale

mardi 20 octobre 2009

Journal de Mister C. (8) : Massothérapie

Une masseuse de chevaux est venue à la ferme. Très très sympa, ouverte, avec des yeux immenses et un sourire comme j'en avais rarement vus.


Elle s'est d'abord occupée du cheval de la pareuse. Je suis super contente parce que j'avais vu juste sur plusieurs points :

  • il avait un truc bloqué au niveau des lombaires,

  • il avait la croupe qui fuyait sur la gauche quand il marchait,

  • il avait un problème d'amplitude au postérieur gauche.


Je l'avais juste longtemps observé hier matin, et puis je l'avais un peu palpé l'après-midi, et j'avais eu ces impressions-là. Je suis très soulagée de voir que je ne m'étais pas gourée.


Ensuite elle s'est occupée de mon Charlie. Les impressions qu'elle a eues collent très bien et avec ce que je ressentais moi, et avec ce que les filles ont ressenti en CI : il a des "problèmes de vieux". C'est-à-dire rien de précis, juste qu'il a les articulations douloureuses.


Il faisait une de ces têtes à certains moments du massage, c'était trop beau de le voir comme ça !


Elle m'a appris à faire quelques gestes de massage pour lui réchauffer les muscles avant de le monter, et puis elle m'a appris à lui faire des étirements pour après l'effort. C'est drôle, le mouvement des postérieurs, c'est un truc qu'il me fait faire de lui-même des fois, quand je lui cure les pieds.


Bref un très grand moment de calme et de détente, une jolie rencontre avec cette personne, et j'ai appris tout plein de trucs.


- - - - - - - - -


Sur la massothérapie équine :


lundi 19 octobre 2009

Journal de Mister C. (7) : Liberté

Cet après-midi j'ai enfin fait ce que j'avais tellement envie de faire avec lui depuis si longtemps. Je l'ai monté en liberté. Pas de mors, pas de selle, pas de carrière, pas de licol, même pas de cordéo : rien que lui et moi.


Il a eu assez confiance en moi pour me laisser le monter sans rien, sans bouger.
J'ai eu assez confiance en lui pour monter sur lui sans attirail de commande.
L'un comme l'autre nous avions peur de ça jusque là.


Et c'est aujourd'hui que notre histoire commence véritablement.


- - - - Le détail de l'histoire (pour l'anecdote) : - - - -


Aujourd'hui j'ai passé la journée avec les chevaux, presque. Mais je n'ai pu m'occuper de Mister C. qu'assez tard, parce qu'il était parti faire une virée avec les copains dans les vignes d'à côté.


En attendant qu'il revienne, j'ai transformé mon ancien licol en corde, auquel j'avais donné une forme de bitless, en un licol étho classique. Et comme j'avais deux longes que j'aime bien mais un peu courtes, j'en ai monté en rênes comme des mécates et l'autre comme longe normale. C'est pas le top mais c'est pas trop mal, faute de mieux, avec les moyens du bord.


Et puis le Charlie est revenu. Alors je suis allée le chercher, mais j'étais plus hyper motivée. J'avais juste envie d'être avec lui, c'est tout. Je l'ai ramené devant la ferme, je lui ai fait un court pansage. Je lui ai mis le licol refait, il lui va bien, ouf (parce que j'avais pas envie de re-défaire les noeuds !!).


Je l'ai invité à me suivre, ça marchait bien. On a joué au porc-epic en alternance avec des demandes pour me suivre et s'arrêter, et tourner dans la direction que je lui montre. Bon, on ne peut pas encore dire que c'est acquis mais il écoute, il écoute, et je trouve ça déjà génial en soi.


Et puis, de voir ces rênes sur son encolure, ça m'a donné envie... Alors je l'ai approché d'une chaise, j'y suis allée vraiment tout doucement en lui parlant beaucoup, en n'arrêtant pas de le caresser, je suis montée sur la chaise, j'ai passé mes mains sur son dos, puis je les ai passées un peu partout, puis j'ai appuyé sur son dos, je suis montée en sac à patates : il n'a pas bronché. Là j'étais déjà hyper fière de lui et j'aurais pu le laisser là-dessus, mais vraiment j'avais trop envie... alors j'ai passé tout doucement une jambe sur son dos en gardant l'autre sur la chaise, je m'attendais à ce qu'il parte mais il n'a pas bougé, il était attentif et très calme. Alors je me suis lancée... hop, à cheval. Et il n'a pas bougé du tout !


Qu'est-ce que je suis fière de lui !!!


On a fait un petit tour comme ça, j'ai remarqué que c'était beaucoup plus facile de le faire tourner avec des rênes d'appui qu'avec des rênes d'ouverture avec le licol (je suppose que c'est normal non ?). On a marché un peu, on est revenus, et j'étais contente, contente, contente ! Je suis descendue, gros gros câlin, je lui enlève le licol, encore gros câlin.


Et là je me dis "Chiche !" Depuis le temps que j'ai une envie folle de le faire. Je l'invite à nouveau à me suivre (ça marche : ouf !), je le guide jusqu'à l'endroit où je suis montée tout à l'heure et où ça s'est si bien passé, je place la chaise correctement. Je monte sur la chaise...


Là, argh ! Une voiture arrive. Un gars qui commence à me poser des questions, et est-ce que machin est là, et est-ce que truc est ici, et où est-ce qu'il peut poser du pain... Mais mince, tu vois pas qu'il est en train de se passer un truc magique, là ? Allez, hop, prends ta voiture et vas-t'en !


Donc... je vérifie que le loulou est toujours avec moi, je passe ma jambe tout doucement comme je l'avais fait en licol... là j'ai une petite hésitation parce que j'ai pas ma bombe, que le cheval est en liberté, qu'il peut se passer n'importe quoi... mais hop, je monte.


Et il n'a pas bougé !!!


Je me tourne vers la pareuse qui s'occupe de son cheval un peu plus loin, elle me regarde, elle sourit. Je caresse mon Charlie très très très très fort, et je lui dis "Allez, on y va ?>" Et hop, il m'emmène.


On s'est baladés comme ça pendant quelques minutes, en totale liberté.


C'était absolument magique.

lundi 5 octobre 2009

Journal de Mister C. (6) : Observations

Longue séance de pansage et massage hier. Mister C. n'aime pas du tout les mousquetons lourds qui pendouillent au bout des licols. Du coup j'ai enlevé la longe. Puis le licol. Il était bien mieux comme ça.


Je lui ai fait des massages avec de l'huile biologique de Leovet. Ça sent extrêmement bon (j'avais oublié ça !), et il a adoré. Il me présentait son poitrail, son épaule droite, la naissance de sa queue... et j'ai pu le masser là où il en avait envie.


Il a toujours les lacunes latérales très profondes aux antérieurs, et pas vraiment saines. Je lui ai bien nettoyé et j'ai mis une préparation avec de l'huile essentielle de pamplemousse pour lui nettoyer. Ça marche bien, mais je devrais le faire plus régulièrement.

lundi 21 septembre 2009

Journal de Mister C. (4)

La scène : Un parc. Deux chevaux : Mister C. et un autre. J'arrive avec, à la main, des plants de haricots à leur donner pour voir s'ils aiment ça. Je les dispose en petits tas à différents endroits dans le parc. Le second cheval teste un premier tas, goûte et aime ça, et commence à chercher les autres. Mister C. ne bouge pas. Je lui amène quelques touffes de haricots, lui présente.


Lui : Qu'est-ce que c'est ? Ah ! Des haricots...


Il reste à les sentir, il remue les lèvres contre les feuilles mais ne mange pas.


Moi : Ben alors, t'aimes pas ça ?


Lui : Ben... si... si si j'aime ça...


Moi : Alors pourquoi tu n'en manges pas ? Tu sais, c'est pour te faire plaisir que je t'en ai apporté, je voulais te changer un peu du foin.


Silence.


Moi : Qu'est-ce qui se passe Mister C. ?


Lui : Mais tu m'énerves avec tes cadeaux ! Alors moi voilà, dimanche tu me dis que c'est la début de la chasse, qu'il faut que je fasse attention, que tu as peur pour moi, que tu voudrais me mettre dans le parc avec l'autre là — je l'aime pas celui-là, il veut tout le temps faire le chef alors que moi je m'en fous de lui — mais que tu as peur que je n'y reste pas. Alors moi j'y vais, dans ce parc. Tout seul, sans qu'on me demande rien. J'y vais, et j'y reste, tranquille, depuis lundi.
Et puis depuis, ben tu viens plus me faire des gratouilles. Avant t'étais toujours là, à chaque fois que tu sortais de chez toi tu venais me voir, me dire un petit mot, voir si tout allait bien. Maintenant je suis à peine plus loin et tu viens même plus, et moi je me retrouve avec l'autre que j'aime pas.
Alors je suis là et je m'ennuie. Et voilà que tu m'amènes des haricots ! Mais qu'est-ce que tu crois, j'adore ça les haricots ! Quand je descendais le soir, quand j'étais en liberté, ben tu vois j'allais faire un tour dans le potager, après être passé dans les maïs, et puis je grapillais quelques haricots, des tomates, des bouts de courges. Ensuite je descendais dans le champ en-dessous, je me roulais dans l'herbe et je sautais sur mes pieds, et je courais, je courais à toute vitesse jusqu'au bosquet. Ensuite j'allais voir les juments dans leur parc. Mademoiselle O. me faisait des gratouilles sur le garrot, elle est un peu chipie mais elle est chouette. Je ressortais du parc, j'allais dans le grand champ de blé, je mangeais des herbes sauvages sur le bord, je descendais dans le lit de la rivière, je me roulais encore, et puis je partais dans le sorgho pour courir encore un peu, avant de remonter à la ferme au matin, où je te retrouvais, et tu sortais de chez toi, tu venais me voir, et des fois tu me brossais et on partait se balader tous les deux.
Alors tu vois ? Tu vois comment j'aime ça les haricots ? Les haricots c'est la liberté. Moi je suis rentrée là pour te faire plaisir...


Moi : Tu sais, c'est pas pour t'embêter que je t'ai demandé ça, je me doute bien que ça doit être dur pour toi, mais c'est à cause des chasseurs. Tu sais comment ils sont, surtout au moment de l'ouverture, tu te souviens comment tu avais peur quand ils tiraient le premier jour, hein ?


Lui : Oui je m'en souviens. Mais c'est pas juste. Avant je faisais ce que je voulais, j'allais où je voulais, je mangeais ce que je voulais. Je voyais plein de gens, tout le monde venait me voir et me disait que j'étais beau, que j'étais trop gentil, il y avait les veaux qui me prenaient pour leur papa.


Moi : Je suis désolée pour toi, Mister C. Sincèrement désolée.


Lui : Ça me manque...
Dis, tu veux pas me gratouiller là ? Non un peu plus haut là... oui voilà, juste là...


Plus tard, je lui ai expliqué que s'il voulait, il pouvait sortir la nuit pour se balader, mais uniquement une fois que la nuit était tombée, et à condition de rentrer avant le lever du jour.


Ben croyez-le ou non, depuis cette discussion, il est sorti les deux nuits, et est rentré juste avant l'aube...

lundi 14 septembre 2009

Crôaaa

Une visiteuse du début de l'été.


dimanche 13 septembre 2009

Journal de Mister C., épisode 3

La pareuse est passée. Il paraît qu'il a des super pieds, que c'est un plaisir, tant mieux.


Je ne l'ai pas remonté, j'ai moyennement envie. Se mêlent nombre d'hésitations concernant son état, je ne veux pas lui faire mal, j'ai sais qu'il boîte de temps à autre au trot, et je ne veux pas en rajouter. Ça m'a fait beaucoup hésiter ces temps derniers, et puis aujourd'hui en y réfléchissant j'ai repensé que les premières fois où je l'avais monté il n'avait pas du tout eu ce problème. Et la différence entre ces fois-là et celles d'après c'est que je l'avais détendu sur beaucoup de cercles avant d'aller balader. Peut-être que c'est une piste pour le soulager.


Aujourd'hui c'était l'ouverture de la chasse, alors hier soir on a dû le faire rentrer dans un box (un grand !) pour être sûrs qu'il ne soit pas sur leur chemin ce matin : on a rudement bien fait. Il était tout affolé, tournait dans tous les sens, regardait partout en soufflant. Et eux, on tiré partout toute la journée.


Heureusement, on bénéficie d'une petite trève demain et mardi. Ensuite il faudra trouver une solution : on ne peut pas le laisser en box tous les jours de chasse...

lundi 31 août 2009

Journal de Mister C., épisode 2

Hier on a fait une séance à pied. Déplacements latéraux, reculer, avancer, me suivre sur des lignes droites et sur des changements de direction, élongations d'encolure. J'ai vu une courte vidéo l'autre jour qui m'a faite rêver sur ce que l'on peut arriver à communiquer à pied, j'ai tenté de m'en inspirer, en fonction de ce que j'en ai retenu. J'ai convenu de quelques mots et quelques postures pour donner des indications à Mister C. et dès que je lui fais une demande, je les utilise. Il a l'air de comprendre pas trop mal !


Après la séance je l'ai relâché, mais il avait tellement envie qu'il attendait toujours que je lui fasse un signe, il me regardait vacquer à mes occupations, il était tout concentré sur moi. Alors je l'ai appelé en utilisant le signe que j'ai commencé à mettre en pratique. Il est venu ! Puis je l'ai invité à me suivre, on a marché un peu ensemble comme ça, en liberté.


Aujourd'hui je ne l'ai pas travaillé, par contre je l'ai suivi ce soir lorsqu'il a quitté le devant de la ferme pour aller se balader. Je l'ai suivi bruyamment, pour qu'il sache bien que j'étais là et que c'était fait exprès. Je l'ai rejoint doucement, on s'est fait trois gratouilles, et puis on a marché ensemble dans le champ. Puis on a couru ensemble côte à côte. Il a donné quelques sauts de joie, il était si beau à voir ! Et je l'ai finalement laissé partir, dans son champ, vers sa nuit de balade. On se retrouvera demain matin.


J'aime ces moments que je passe avec lui. Je n'aime pas monter à cheval le soir, j'ai l'impression de porter avec moi toute la crasse de la journée, des obligations, de la fatigue, des choses à finir, la liste des courses, les trucs à ne pas oublier. Quand je monte à cheval, j'aime être libre de tout ça. Il n'y a rien de tel que de monter le matin, d'en faire la première chose de la journée. Je suis alors vierge de tout emploi du temps. Le soir, c'est juste pour jouer.

samedi 29 août 2009

Journal de Mister C., épisode 1 : Pilote

Il se passe des choses. Plein, tout plein, des petites et des grandes, signifiantes ou si peu, mais toute la vie est présente en chacune. Parmi ces choses, il y a la rencontre avec Mister C. J'en ai déjà parlé, c'est un cheval qui vit à la ferme. Je l'aime, et j'ose imaginer qu'il m'apprécie un peu. Et parce que depuis une petite année il se retrouve propulsé dans une vie radicalement différente de son environnement précédent, parce que je le vois évoluer chaque jour et parce qu'il m'apprend tant de choses sur lui-même, sur les chevaux, sur moi et sur le monde, j'ai envie de venir raconter cela, de temps à autre, ici.


Pour ce "pilote" d'une nouvelle série sur la vie trépidante de Mister C., je peux commencer par présenter le personnage principal.



Il s'appelle Mister C., il a 20 ans. En fait, c'est son 3e nom ; le premier était son nom de naissance, donné par l'éleveur ; son propriétaire actuel lui a donné le deuxième lorsqu'il l'a acheté, il a fait changer ses papiers en conséquence (et si je vous disais ce nom, vous n'y croiriez pas) ; et lorsqu'il est arrivé ici, le fermier n'arrivant pas à prononcer son nom, a commencé à l'appeler du troisième, parce que ça sonnait "étranger" et que ça lui allait bien. Il a été adopté. Le nom, comme le cheval.


Mister C. est grand, bai brun foncé presque noir avec le bout des crins un peu éclairci, une tâche en tête et il boit dans son blanc. Il a 3 balzanes, une haut-chaussée et les deux autres un peu plus basses, je ne sais plus comment on dit (tous ces petits noms de spécialistes...). Il est tout fin, un corps d'athlète, issu d'une grande race à sang chaud peu connue ici mais semble-t-il très réputée pour les compétitions de dressage. Il est fier, le regard droit, la queue en panache à la moindre occasion, il aime qu'on le regarde.


Il est franc, et blagueur à l'occasion. Il sait ce qu'il veut, et surtout ce qu'il ne veut pas, et sait ne pas se laisser faire. Je pense qu'il a pris l'habitude de passer pour un cheval avec un fichu caractère. Lorsque j'ai commencé à le monter, son propriétaire, curieux et un peu gêné tout de même, m'a demandé : "Et tout se passe bien ?
- Ben oui, super bien.
- Et... vraiment, ça va ? Il est calme ?
- Ben, oui : calme, gentil, confiant... pas de problème.
- Ah, bon. Mais... et... vous n'êtes pas tombée ?
- Ben non, pourquoi ?
- Heu... Non, non, rien... c'est bien...
"


Tout a commencé il y a un mois à peu près. Avant cela il y a eu de nombreux faux départs entre nous. Je m'occupe de lui régulièrement. Je le monte aussi. Je le travaille. Je communique, j'apprends à le connaître.


Actuellement il est en liberté dans la ferme : il saute les fils des parcs comme qui rigole, et aime être là où les choses se passent, là où les gens sont. Il passe la journée ici, devant la maison, et le soir venu il part faire un tour, il va manger, se rouler, courir et sauter, se détendre, voir les autres chevaux restés dans leur parc, regarder le paysage ; au matin, il revient.


Il a probablement passé sa vie dans une écurie, au box 23h sur 24, et de temps à autres brossé vite fait, sellé, monté, désellé, rangé au box. Jamais une séance de monte sans ce rituel. Un seule façon de monter, un seul cavalier, un seul style, un seul univers et jamais de variante. Il a deux attitudes : celle du cheval au fichu caractère lorsqu'il est en liberté ou au licol, et celle du cheval parfaitement soumis dès l'instant où on lui met son mors. Dès qu'on lui pose un tapis sur le dos il se met à tiquer à l'air (1), lui qui est si calme et tranquille normalement. Incroyable transformation, systématique et immédiate.


J'ai voulu commencer par briser cette attitude de Dr Jekhill et Mr Hyde. Je lui ai mis son filet sans le monter, je l'ai monté sans filet. J'ai pris du temps pour le seller, j'ai posé le tapis en lui parlant doucement, je l'ai laissé comme ça pour qu'il ne stresse pas, je l'ai sanglé très progressivement, sans trop serrer. Je lui apprends à ne pas bouger au montoir, lui qui a tendance à fuir dès que l'on met son poids sur l'étrier. On a fait des balades avec un bitless (2), j'ai mis son mors au clou, plus question de lui mettre ce bout de ferraille dans la bouche. Je l'ai monté sans selle : il a eu peur, puis il l'a accepté mais ne comprenait pas où je voulais en venir. Je lui fais découvrir de nouvelles choses, chaque chose en son temps, petit bout par petit bout, je le félicite beaucoup, je suis très fière de lui, et je veille à lui laisser le temps de réfléchir à tout ça, de s'imprégner de toutes ses nouvelles impressions.


Il y a des millions de choses à dire, mais chaque chose en son temps. Voici pour un premier petit bout.


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Notes :
(1) Il appuie sa mâchoire quelque part et il avale de l'air, ce qui est un signe de stress.
(2) Un genre de filet sans mors.

lundi 1 juin 2009

Des gens, des animaux et tant d'avenirs possibles

Je n'arrive pas encore tout à fait à le croire, mais pendant les quelques mois qui commencent aujourd'hui je devrais me sentir mieux. Beaucoup de choses s'y prêtent. Je retrouve un milieu connu, aimé. Différent certes parce que quitté il y a quelques années, ayant évolué, autres personnes autres lieux autres statuts. Mais alors que je n'y suis même pas tout à fait encore quelques liens se sont immédiatement retissés, ont repis leur place tout naturellement dans la trame.


C'est là que je me dis qu'on a beau dire, on a beau aller chercher ailleurs parce que c'est ce qu'on nous demande de faire, parfois ce n'est pas nécessaire. Parfois ça ne fait que durcir le coeur. Ça ne fait que voir les parties sombres auxquelles on avait eu la chance d'échapper. Instructif ? Sûrement. Et destructif tout autant.


C'est comme revenir au pays. Rentrer à la maison. Rouvrir les yeux après un cauchemar et retrouver son chez-soi.


Je ne veux pas non plus trop y croire, parce que ça ne passe jamais comme on l'attend, parce que ça se passe toujours autrement que ce à quoi l'on s'attend. Parce qu'on me l'a trop fait. Parce que je suis brisée. Parce que je vis un peu ça comme un bouquet final, et que cette impression me fait le double effet d'un plaisir et d'une menace.


Ne pas refermer les yeux sur ce que je suis. Ne pas m'oublier dans ce monde qui ne pourra être le mien que si je peux y croître selon ma propre nature. Ne plus chercher à adopter les volontés des autres.


Je veux profiter de ce moment pour vivre ma propre vie, la mienne, celle que je peux vivre. Mes mots ont déjà changé je le sens, et tous ne sont pas prononcés sous l'effet du dépît. Je crains moins le jugement, j'ai par conséquent aussi moins besoin de dire comment je vois les choses à tout bout de champ, ce qui m'évite de récolter tous les avis qui passent, et me sont inutiles, et me sont nuisibles. Je veux pouvoir aimer les gens sans leur reprocher de ne pas soutenir mes choix. Je n'ai pas besoin de leur demander leur accord, ni même de leur exposer mes envies — qui au demeurant, pour l'essentiel sont de me laisser du temps pour réagir en fonction de ce qu'il se passera, en sachant grosso modo ce que je veux, et en restant ouverte aux opportunités qui me permettront d'y parvenir.


Ne plus vivre en opposition, me laisser échanger avec mon milieu, mon "écosystème à moi" aussi complexe qu'il puisse sembler. Laisser chaque élément exprimer l'influence qu'il voudrait avoir sur le tout, y réfléchir et en tenir compte. Me pardonner, être indulgente, tolérante, aimante envers moi-même. Personne ne le fera à ma place.


J'a fait des trucs très bien et aussi plein de trucs nettement moins bien ces derniers temps. Il y a des jours où j'ai les nerfs en pelote, des moments où j'ai envie de m'enfoncer dans un trou de souris. Il y a des fois où je me lance dans une activité constructive pleine d'entrain au détriment d'autres choses que je devrais faire ; que je ferais mieux de faire, si j'étais une machine et que je fonctionnais uniquement sous l'impulsion d'un savant calcul de rendement relatif de chaque chose à faire. Je ne suis pas une machine, et même que j'ai le droit parfois de faire autre chose que ce que je devrais faire, que ce qu'on me demande de faire. Dans les cas où j'en suis consciente, et d'autant plus dans ceux où je ne le suis pas. Et même si je me rends compte ensuite que c'était une erreur.


Le vent se lève. Il fait si beau. J'ai caressé "mon" (*) cheval ce matin. J'ai discuté d'humanité qui se rencontre, de climat alpin, de solaire photovoltaïque, raconté une vieille histoire dans un nouveau contexte. J'ai goûté les rayons du soleil, le silence et les animaux de la ferme au matin. Poules, pintades, lapins au p'tit cul blanc qui batifolent dans l'herbe, chiens, chats et chevaux ; ânes et vaches plus bas. J'ai bu du café, écouté de la musique comme un souvenir d'un week-end de découverte des autres et de moi avec eux. J'ai lu des blogs, pris le temps, rédigé quelques commentaires, répondu à ceux qui m'étaient adressés.


Je vais descendre me faire à manger... ou pas. Je verrai bien. J'ai le temps, ou peut-être pas, mais je m'en fous.


- - - - - - - - - -


(*) Ce n'est pas le mien et bien qu'on le l'ait confié, je peine considérablement à le dire comme ça, même si ça simplifie bien des détours de parole. Mon doigt cassé et mon manque de temps pour lui de ces 2 derniers mois n'arrangent pas ma sensation vis-à-vis de cette situation d'ailleurs.


Tout cela me donne d'ailleurs une lecture d'une simplicité extrême sur cette fracture de l'annulaire : peur de me lier, trop peur que ça fasse mal, tellement peur de ce lien en train de se souder que je préfère briser toute possiblité d'approfondissement : je me casse le doigt (avec son intervention d'ailleurs puisque c'est lui qui a tenu le rôle du "casseur"), je ne peux plus m'en occuper. Le doigt est brisé, le lien aussi. Tout le contexte me fournit en outre plein de "bonnes raisons" pour venir enrichir cet abandon du lien, pas le temps, pas envie parce qu'il est peut-être pas si gentil que ça, il ne me fait peut-être pas si confiance que ça (sinon il m'aurait pas "fait" un coup pareil), et puis si ça se trouve on va peut-être déménager (c'était pendant les concours),...

jeudi 28 mai 2009

De jolies choses aussi

Parce que la vie ne s'arrête pas .



Ophrys fuciflora (je crois !), Lac de Sainte Croix, avril 2009.

Il y a eu le retour du soleil, quelques apéros de fin d'après-midi entre amis, la tendre présence quotidienne de mes voisins, de nouvelles amours équines si touchantes, l'amour de mon mari au travers des tempêtes qui nous tansent, la musique, le potager qui n'en finit plus de pousser, des sourires, des fleurs, les incroyables senteurs du printemps.

vendredi 10 avril 2009

Au matin d'un petit grand monde

La timide lumière du soleil pas encore tout à fait levant contre le mur de l'escalier. Elle vient d'attirer mon œil pendant que je montais ici avec mon café.


Ça fait quelques temps que je réveille tôt. Non, pas si tôt que ça tout de même ! Entre 6h et 7h30, ça dépend des jours. Et je vois les couleurs naître sous les chants des coqs. Puis j'entends les premiers cris d'oiseaux. Parfois, l'âne M. passe la nuit près de la maison et nous gratifie d'un concert de braiments à intervalles réguliers. À partir de 7h et demie commencent les premières visites à la ferme : il y en a qui ont leurs heures, d'autres leurs jours, et d'autres encore qui improvisent. À 7h30, souvent, c'est un fermier d'un peu plus loin, un vieux maraîcher très célèbre dans le coin pour ses courges muscade, qui vient boire le café. Il est petit, rond, lourd, se déplace difficilement, a le visage buriné par le pastis et le soleil. Il vient presque toujours seul, parfois accompagné de son fils. Il fait des blagues d'obsédé sexuel, c'est pas toujours sympa, surtout de bon matin... mais il est gentil dans le fond. Même s'il est spécial, différent, qu'on ne partage franchement pas beaucoup d'avis.


Entre 8h et 9h passent toutes sortes de gens. Des amis, des connaissances, des collègues, de la famille, qui restent un peu ou ne décollent plus, qui viennent dire bonjour, boire un café (ou deux, ou trois...), grignoter un petit quelque chose que la maîtresse de maison vient de sortir du four ou qu'on lui a apporté, qui viennent demander un service, rendre un service, prêter ou ramener un outil, donner un coup de main, prendre l'air ou des nouvelles.


Il y a les filles de la ferme qui passent au QG, quand elles ne travaillent pas pour le viticulteur du dessous. Qui se demandent ce qu'elles vont faire à manger à midi, le soir. Elles sont parfumées et portent des talons.


Il y a les rares, ceux qui sont partis, ceux qui viennent de loin, ceux qui travaillent trop, ceux qui sont occupés. Il y a ceux qui manquent, et ceux qui viennent par habitude. Il y a ceux qui s'incrustent. Et il y a ceux qui boudent, mais qui reviendront — on le sait.


Sur le fil en face de ma fenêtre, il y a un tout petit corbeau posé avec un très grand ver de terre dans le bec. Il regarde dans tous les sens... je me demande ce qu'il cherche.


On ne donne quasiment plus de foin aux chevaux : ils ont enfin assez d'herbe dans leur parc, dont on a encore doublé la surface il y a peu. Ils aiment être derrière les arbres, je suis contente qu'on leur ait donné cet espace aussi, j'étais sûre qu'ils aimeraient, le point de vue est superbe, ils voient loin, il n'y a pas de pierres.


Ce monde qui m'était étranger il y a si peu de temps m'a adoptée moi toute entière. J'avais tellement peur qu'on me juge trop différente, trop écologiste, trop théoricienne, trop féministe ou je ne sais quoi mais non. Le matin de mon anniversaire, voyant que j'étais sortie faire une course, les filles m'ont appelée et m'ont chanté "joyeux anniversaire" au téléphone, et moi en les entendant j'avais les larmes aux yeux. Il y a quelques temps, on a reparlé de notre fils au hasard d'une conversation, et notre fermier s'est mis à pleurer. Leur vie a été marquée d'épreuves difficiles ; dans un livre de Michel Odoul, j'ai lu une théorie selon laquelle c'est aux personnes les plus fortes que l'on ajoute un handicap. Ils doivent être sacrément forts dans ce cas... et je les admire, souvent.


Le soleil vient à présent éclairer le mur. Je vais prendre une petite douche, m'habiller, et aller rejoindre ce petit monde, si petit mais si grand.

mercredi 8 avril 2009

Et qu'est-ce qu'elle fait pendant ce temps-là ?

Envie de reprendre un peu la plume ici. Juste un peu — et on verra bien.


Pas pris part à tout ce qui se passe autour de mon travail. Souvent je reste sans voix à lire des nouvelles de partout, des témoignages, des analyses. Parfois je pense que j'aurais dû, que je devrais participer. À ma manière, je le fais tout de même. En réalité, dans le quotidien, avec les gens que je côtoie, ceux qui vivent autour de moi, ceux dont je croise le chemin.


Celui qui pense que répéter sans cesse la même absurdité la rend réelle ; je prends le temps, tout doucement, avec tendresse, avec empathie, en attendant ses questions, en suivant ses regards, de lui expliquer pourquoi j'ai un avis différent du sien. Je n'impose pas ce que je pense, je le raconte, à la demande. Celui qui, au bout du pastis de trop, s'égare dans une blague raciste ; je ne ris pas, je constate que tous autour de la table nous nous regardons en silence sans savoir quoi dire, tous nous sommes choqués, et je goûte cet espace sans parole où chacun réfléchit à ce qui vient de se passer, à comment réagir, à comment non pas rendre violemment la pareille mais la rendre par le ridicule, par le malaise. Celui qui se croit plus bas que d'autres sur une échelle imaginaire de valeurs parce qu'il n'a pas de diplômes, parce qu'il n'est pas intellectuel, pas cultivé ; je mets en avant ses connaissances, ses qualités, et nous échangeons chacun dans ce qu'il fait, nous apprenons à nous connaître et petit à petit, il s'enhardit à être fier de ce qu'il sait, de ce qu'il fait, à vouloir raconter ce qu'il aime sans peur d'être jugé trop ci pas assez ça. Celle qui s'est ensauvagée parce qu'elle a vraisemblablement trop souffert des autres (et d'elle-même par construction) dans son passé ; je lui apprends à simplement accepter la bonté sans méfiance, à dire ce qui la rend heureuse et pas uniquement ce qui la déçoit, à briser un petit bout de ce mur qu'elle a construit autour d'elle pour se protéger d'autres qui ne sont plus là, à jouir de petits bonheurs sans prétention. Celui, tout petit, qui apprend les additions et les soustractions ; je lui fais de l'arithmétique sous forme de dessins, pour lui apprendre à "voir" les chiffres puis les nombres, et je constate avec le plus grand bonheur que ça marche : il commence à chercher une logique, un ordre, quelque chose qui lui parle, qu'il comprend et sait reproduire. Celui qui est agriculteur et m'avoue qu'il voudrait passer au bio, qui sait que c'est important, mais qui ne sait pas comment s'y prendre ; je lui cherche des informations, je lui pose des questions pour comprendre ce qui le freine, je l'encourage ; je lui explique aussi ce qu'est le bio et ce qu'est l'agriculture conventionnelle d'aujourd'hui, en tout cas je lui dis ce que j'en sais moi en tant que "consommatrice", et lui m'explique ce qu'il sait lui en tant qu'agriculteur, et l'on constate avec ébahissement la distance qui nous sépare, et l'on trace un pont entre nous deux, petit à petit, pierre par pierre, avec un grand plaisir, avec le sourire, avec plein de volonté et une très grosse dose d'humour. On s'encourage l'un l'autre, on avance, on progresse, on s'enrichit.


Voilà ce que j'ai fait ces derniers temps. Ça et d'autres choses, mais ça aussi et surtout. J'aurais voulu garder du temps pour continuer à lire les blogs qui alimentaient mon quotidien jusque là, mais je n'ai pas eu le temps. Quelques années, quelques mois auparavant je disais que je voulais me relocaliser, être plus présente à mon milieu, à mon pays, aux gens autour de moi : j'y suis enfin solidement ancrée. J'y travaille chaque jour. J'y prends un plaisir immense. C'est parfois fatiguant, je m'arrache les cheveux sur certains points, je ris beaucoup d'autres choses, et on se taquine tous, j'apprends à connaître ces gens d'ici et eux apprennent à me connaître, moi qui suis un peu de là-bas pour eux, de là-bas dans les sphères de l'intellect, moi qui n'ai pas d'accent ou si peu, moi qui travaille dans un bureau, moi qui fais des recherches dans un domaine dont ils n'avaient même pas connaissance de l'existence, moi qui les étonne à passer beaucoup de temps avec eux en journée et qui travaille tout de même sans arrêt, moi qui fais 200km aller-retour pour aller sur mon lieu de travail et qui leur explique que je suis favorisée parce qu'avant j'étais à 700km de mon bureau et qu'après peut-être je serai encore plus loin. Eux qui sont bourrus, sauvages, peureux, hommes de la terre et femmes de ménage (et qu'est-ce que je peux les bousculer là-dessus sans même m'en rendre compte !), parfois hors-la-loi, n'affectant aucune valeur à leurs idées, à leurs propos parce qu'on leur a tellement appris à se faire tous petits, mais eux qui sont tellement joyeux, touchants, bons, infiniment bons et gentils et honnêtes, et valeureux, et braves, et drôles, et curieux.


Hier l'un d'eux m'a dit au café du matin à la ferme :
"Ça va te faire du bien d'aller travailler aujourd'hui, tu vas voir tes collègues, vous pourrez parler de recherche, de choses compliquées.
- Ben, pourquoi tu dis ça ?
- Parce qu'ici tu peux pas parler de toutes ces choses, ça doit te manquer, nous on est des ignares, on sait rien de tout ça...
- Peut-être, oui, mais vous êtes tellement plus vivants."

J'apprends tellement de choses à leur contact. J'apprends la terre et les animaux, j'apprends ce qu'il reste du provençal de leurs ancêtres, j'apprends les traditions, j'apprends l'histoire (et les histoires) du présent-ici, j'apprends leurs différentes passions, j'apprends leurs difficultés, j'apprends tout ce monde que je n'avais fait qu'effleurer jusque là et où je ne savais pas entrer malgré ma volonté. Et avant toute chose, et en grandeur nature, j'apprends l'infinie bonté de l'humanité, sa grandeur et sa beauté.


Alors non, je n'ai pas fait grève. Je n'ai pas manifesté. Je n'ai pas été en AG. J'ai fait autre chose pendant ce temps, des choses que j'ai pensé être capable de faire, ce que je peux là où je suis. Il y a tant de façons de tâcher de construire un monde plus beau, et j'en ai essayé un nouveau. Ne pas lutter contre la destruction, mais faire en sorte que finalement celle-ci n'ait rien détruit de réel puisque d'autres choses se sont construites à côté pendant ce temps, de plus haut et de plus fort. Je l'espère.