Cinquième et dernière question de la série (la deuxième est ici, la troisième là et la quatrième là) :
Que t'apporte ton blog, en positif et négatif ?
Quand j'étais petite fille je tenais un journal intime. J'ai écrit des milliers de pages comme ça, sans jamais savoir d'où venait ce besoin, d'écrire tout le temps tout ce qui me passe par la tête. J'écrivais aussi des poèmes, des nouvelles, et puis des espèces de recherches-fiction. Et puis un jour j'ai arrêté, je ne sais même plus quand. Non, quand j'y réfléchis, en réalité je n'ai jamais complètement arrêté, j'ai toujours eu un carnet dans mon sac sur lequel je laissais dériver les mots quand j'avais du temps à passer, quand j'étais seule et au calme. Mais c'était devenu moins régulier et surtout, moins varié.
D'un autre côté il y a internet. J'ai commencé à m'y exprimer en découvrant les forums Usenet, et plus spécialement fr.sci.philo. Ça m'a énormément plu de pouvoir échanger des idées avec plein d'inconnus, au gré des visites. Ensuite j'ai découvert OPLF. Dans les deux cas je me suis fait des "amis virtuels", des gens avec qui il se créait un type de lien complètement nouveau et agréable.
Pendant tout ce temps j'ai plusieurs fois essayé de commencer un blog, mais toujours en vain. Je ne savais pas quoi écrire, je ne savais pas par où commencer. Malgré tout je sentais bien que j'en avais envie. Mais j'étais écartelée par le fait de ne pas savoir ce que je pouvais dire sur un tel support public, je ne savais pas si je voulais le conserver privé ou alors au contraire essayer d'échanger avec des lecteurs / blogueurs. Donc j'ai longtemps commencé, tâtonné, et arrêté aussi vite.
Et puis l'an dernier j'ai recommencé, à un moment où le site web collectif que j'avais fabriqué a eu des problèmes et a brusquement disparu (pour une sombre histoire d'hébergeur malhonnête, mais passons). J'avais envie de continuer ce que j'avais commencé, j'avais pris mon élan, même si j'ai un peu patiné au début. Et puis petit à petit, plus j'écrivais plus je savais quoi écrire, plus les idées venaient, moins j'avais le trac. Et c'est progressivement devenu ce que c'est actuellement.
Je n'ai jamais géré le contenu de ce blog en pleine conscience. Les sujets me viennent au jour le jour, je ne me demande jamais si ça a quelque chose à voir avec le reste, si c'est bienvenu ici : je considère que ce blog est une facette de moi-même, et tant que j'ai envie d'y mettre quelque chose, c'est que ça y a sa place.
Mais je considère bloguer comme un échange : ça consiste non seulement à écrire un blog mais également à lire d'autres blogs, sinon ça ne sert à rien, à mon sens. Tout ça m'apporte des liens que j'apprécie, qui font partie d'un petit rituel quotidien que j'affectionne.
Et puis ça me permet de poser mes idées, comme je l'ai dit une fois ici. Ça me permet de reparcourir les chemins que j'ai déjà pris, de retrouver des choses que j'ai déjà dites. Ça me permet de ne pas oublier. Parce que l'une de mes spécialités, c'est d'oublier ce qui m'arrive. Les événements, et mes émotions d'alors. Donc ici je peux les noter, et les retrouver au besoin. Ça m'a déjà été bien utile à plusieurs reprises.
Ça me permet aussi de confronter mes pensées à un ensemble de personnes dont je ne gère pas la nature. Ça me permet de discuter, de recevoir des témoignages divers et toujours enrichissants.
Ça me permet aussi de consigner mes photos de nature pour pouvoir comparer d'une année sur l'autre si les événements arrivent en même temps, ou en avance, ou en retard. Ça, ça faisait longtemps que j'avais envie de le faire, et je suis très contente d'y être enfin arrivée.
Les deux inconvénients majeurs que j'y trouve sont d'abord que ça me prend du temps. Ça me prend le plus souvent toute la matinée, entre les blogs et autres sites que je lis, et les billets que je publie, et je voudrais faire autre chose de mes matinées. Je voudrais pouvoir échanger ce moment contre un autre, bloguer le soir ou alors, pendant l'été, en début d'après-midi quand il fait trop chaud pour faire autre chose, mais je n'arrive pas à changer ça. C'est très difficile. Mais ce n'est pas exactement le fait du blog, ça vient plutôt de mes habitudes autour de ça.
Le second inconvénient est lui aussi extérieur au blog lui-même, mais malheureusement lié : c'est que pour bloguer il me faut être connectée à internet, et que pour être connectée il me faut un câble ethernet, et que pour que ce câble soit banché il faut que ma machine soit sur la table, et qu'assise à cette table je suis dans une position très inconfortable, ce qui fait qu'au bout d'une heure ou deux j'ai comme un couteau planté dans la nuque, c'est très douloureux. Parfois je me déconnecte et je m'installe sur le canapé, mais ce n'est pas pratique. Alors j'ai mal, et je ne peux guère faire autrement.
Et puis, je rajoute un troisème inconvénient auquel je pense, c'est la confrontation entre ce que j'écris dans ce blog et ma vie professionnelle. Il y a des choses que j'écris ici mais que je ne devrais pas, pour "préserver toutes mes chances". Je joue sur ma relative anonymité, mais je sais qu'elle est tout aussi précaire que le sont mes contrats de travail... alors j'ai fait un choix en écrivant mes pensées sur ce blog : celui d'accepter ce que je suis, et de faire avec. Si jamais un jour ça me joue des tours professionnels, alors c'est que c'est la vie.
Finalement, je voudrais ajouter que ce blog m'a beaucoup aidée cette année à avancer. Même si j'ai échoué sur plusieurs plans, j'ai tout de même beaucoup progressé sur moi-même pendant ces derniers mois et je crois que c'est intimement lié (entre autres choses) à ce qui s'est passé ici. J'ai appris à m'y exprimer le plus honnêtement que je peux, à y déposer les mots tels qu'ils me viennent, et à oser laisser voir qui je peux être, non seulement à moi-même mais, par définition du truc, au monde entier. Même si ce monde entier n'est pas celui que je côtoie quand je referme l'ordinateur, il en fait partie : mes co-blogueurs ne sont pas des machines. Sans oublier aussi qu'il y a des personnes qui lisent ces lignes et que je connais en dehors de l'internet.
Au début je voyais ça presque comme un dédoublement de personnalité, mais plus le temps passe, plus ce blog se construit et plus au contraire, il m'apprend à comprendre qui je suis, à comprendre quelle est l'unité dans tout ce que je vis. Alors même si ça me prend du temps (et que ça me fait mal à la nuque), je trouve que c'est un investissement qui vaut largement le coup.
Pour conclure, je veux remercier encore une fois Meerkat pour ces questions. (Et s'il y a des volontaires pour y passer, il suffit de le demander !)
4 Commentaires :
ce qui est sur c'est qu'il témoigne d'une grande vitalité & d'une approche de l'existence riche & singulière, la pensée est en mouvement, la mémoire vive,
cet exercice littéraire est un bon guide pour le lecteur & en plus il est clair & fleuri : je ne marche plus de la m^me façon ds l'herbe depuis!
bon je sais c'est tout ce qu'il ne fallait pas dire'
loué soit par ci par là
Une série de petits cailloux blancs pour retrouver son chemin... et le continuer aussi.
Ne me remercie pas, c'est un plaisir de te lire et de dériver avec toi au fil de tes mots et de tes pensées. J'aime beaucoup qu'il n'y ait pas de ligne directrice, si ce n'est ce que toi tu as envie de dire et d'évoquer.C'est ce qui fait l'unité de tes écrits.
C'est crai qu'écrire sur son blog permet de comprendre certaines choses, creuser certains points de soi, moi aussi au fur et à mesure je découvre des liens entre mes billets auxquels je n'avais pas pensé. Mais par moments aussi, j'ai de fortes envies de le passer par dessus bord.
Merci à vous trois, je ne ssaurais pas comment commenter vos commentaires mais en tout cas sachez que ça me touche beaucoup.
Meerkat > "Mais par moments aussi, j'ai de fortes envies de le passer par dessus bord."
Je ne ressens pas (encore ?) ça. Enfin... en fait quand je suis rentrée de conférence, en juin, si, j'avais un peu envie de ça. Mais pas depuis.
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