Enfin... c'est pas encore tout à fait gagné mais quand-même je me permets quelques heures, voire même peut-être quelques jours de calme, parce que je l'ai bien mérité.
Lundi j'ai vécu une journée tout à fait incroyable. Ce n'est pas exactement la première fois que ça m'arrive, mais c'est rare. Tout d'un coup, tous les petits contacts du quotidien qui prennent une dimension plus forte, plus cordiale, plus humaine, plus personnelle. Sans doute, lundi, ça venait du fait que j'avais vécu en fin de matinée une expérience dont je suis bien fière, et que du coup j'étais très contente, détendue, et j'avais confiance en moi. Et le tout, sans y penser.
J'ai discuté avec plein de gens, presque tous ceux que je croisais (enfin pas tous non plus parce que c'était à Paris alors bon ça fait du monde au mètre carré...). Il y a eu le barman, le serveur, le patron et même le cuistot du petit café où j'ai déjeuné, on a blagué sur mon sac à dos, ils me prenaient pour une routarde. Il y a eu les contrôleurs SNCF quand je suis redescendue du train dans lequel j'avais pris place, parce que je me suis rendue compte que le TGV qui partait vers Bordeaux à 16h10 c'était pas celui dans lequel j'étais assise... c'était celui d'à côté. Donc je suis descendue du mauvais train, et je leur ai raconté ça sur le quai, et on en a rigolé pendant un quart d'heure. Et puis il y a eu ce SDF devant la gare, quand j'étais sortie fumer une clope en attendant le TGV suivant, qui était vraiment très sympa et m'a raconté plein de trucs. Evidemment il était un peu dingue parce qu'il vit dans des conditions super difficiles, de quoi faire perdre la boule à n'importe qui, mais on a rigolé, on a discuté, et puis je lui demandé pourquoi est-ce qu'il ne quittait pas la ville pour aller habiter à la campagne. J'étais contente de pouvoir lui poser cette question, parce que je me la pose toujours quand je vois des SDF en ville, et pour une fois je pouvais la poser à l'un d'entre eux. Et puis il y a eu les gens dans le TGV (le bon, cette fois...), qui ont tous participé à donner à ce voyage un aspect tout à fait surréaliste. Il y avait derrière moi deux catalans, et derrière eux deux créoles de je-ne-sais-où (je ne distingue pas bien les créoles) qui tous se racontaient des choses sans doute passionnantes et surtout très fort (parce que quand on ne parle pas la langue locale, on a presque toujours tendance à penser que parce qu'on ne nous comprend pas, on ne nous entend pas...) et puis devant moi, une nana qui avait une conversation téléphonique passionnée dans une langue africaine que je n'ai pas reconnue non plus (un truc pas complètement exotique : pas une langue à clics, quoi, mais quand-même c'est pas fréquent d'entendre ce genre de langue). Elle hurlait littéralement, ce qui faisait que tout le monde soufflait ostensiblement en lui jetant des regards courroucés... et puis les contrôleurs sont arrivés et ont tenté de lui exliquer qu'elle était censée aller sur la plate-forme pour téléphoner, mais elle ne comprenait pas, alors ils lui mimaient la scène, mais elle ne comprenait pas non plus... et avec mon voisin de banquette, un gars en costard, complètement débraillé et qui avait même enlevé ses chaussures (c'est tout de même rare), nous deux qui essayions désespérément de regagner quelques minutes de sommeil pendant le trajet, on se rergardait et on était morts de rire. Et puis j'ai ouvert les yeux et regardé le paysage entre Poitiers et Angoulème, et juste à cet instant on est passés devant deux chevreuils en train de brouter dans le champ de blé le long de la voie ferrée.
J'ai eu le sourire aux lèvres toute la journée. C'était très chouette, y'a des jours comme ça. Dans ces jours-là je ne pense pas en regardant mon voisin qu'il y a 30% de chances pour qu'il vote Sarkozy le 22 avril, qu'il y a encore plus de chances pour qu'il produise une quantité tout à fait déraisonnable de déchets polluants, pour qu'il participe activement à l'enrichissement démentiel des déjà trop riches, pour qu'il soit l'un de ces consommateurs naïfs lambda, je ne pense pas que tous ces gens manquent de respect d'une manière générale, je rencontre plein de personnes toutes différentes, chacune avec une histoire que je surprends en instantané, et je me dis que c'est drôle de se croiser comme ça tout à fait par hasard et qu'on puisse profiter de cette rencontre éphémère.
Et puis...
...bon si vous voulez tout savoir, ce qui s'est passé de si bien c'est que lundi matin j'ai auditionné pour un poste au CNRS en section 45 et que ça s'est super bien passé. C'était ma toute première audition, j'avais préparé ça en catastrophe en deux jours (alors que bon, théoriquement quand on le fait sérieusement il faut s'y prendre 2 mois à l'avance), toute seule, sans conseils, sans rien (et évidemment, pour couronner le tout, je n'avais pas dormi de la nuit, question de pimenter un peu le truc). Et même si ma prestation ne vaut sans doute pas un poste (LE seul et unique poste de la section pour cette année sur 69 candidats tous avec des CV longs comme le bras et 12 mille postdocs aux états-unis etc.), hé bien je suis super fière de moi, parce que j'ai fait une bonne présentation (10 minutes pour raconter à des non spécialistes qui on est, d'où on vient, ce qu'on a fait, en quoi c'est absolument génialissime, et ce qu'on va faire pour la suite, où on veut le faire et pourquoi, tout en faisant le nécessaire pour sortir du lot), que j'ai eu plein de questions (et puis des bonnes en plus, pas juste des questions de forme), et que l'ambiance était super cordiale (en ressortant, j'ai discuté 3 minutes avec la candidate suivante, visiblement très tendue, je lui ai dit qu'ils étaient très sympas et elle m'a répondu "Ben oui j'ai entendu vous arrêtiez pas de vous marrer !"). De quoi me redonner confiance dans mes possibilités, et arrivée gonflée à bloc pour la prochaine audition...!
Il serait de bon ton que je prépare maintenant deux articles pour deux conférences à venir (un pour dimanche et l'autre pour vendredi prochain), mais je crois que je vais m'accorder tout de même entre temps quelques moments de calme, de balade, de lecture, de tour de jardin... question de reprendre contact avec la vie.
5 Commentaires :
Bravo pour ta prestation ! et aussi pour avoir su cueillir l'instant magique malgré la fatigue :)
Bon retour au calme, je suis sûre que tes articles sauront t'attendre ;)
C'est gentil caco ! :-)
Du coup aujourd'hui j'ai fait quelques photos, et puis j'avais envie de reprendre mon argentique pour une fois... ça m'a fait du bien !!
ma parole, tu avais mang� du topset (substance idylique et autoris�e dans l' imaginaire de mon enfance, je ne sais meme pas si cela existe)...
bravo bravo, tu as fait rire, tu as donc tes chances, il faut rever... (merci pour mon identit�, j'imagine que c'est � toi que je le dois, sinon je ne sais pas comment c'est venu tout seul)
� plus et encore bravo, je suis fiere de toi
les voyages en train sont effectivement tr�s riches d'occas; j'en garde des souvenirs epiques; c'est bien d'en avoir profit�;
Et bien quelle aventure...
Et le sdf, il a répondu quoi à ta question?
ET je découvre que nous partgeons (surement avec bcp d'autres) le vice de la clope...
Bonne journée
Et le sdf, il a répondu quoi à ta question?
--> Il n'a pas vraiment répondu, il s'est mis à me raconter qu'il a de la famille à Nice et que c'esy beau là-bas, alors je lui ai dit que oui pardi puisque c'est chez moi, et puis de fil en aguille... on a changé de sujet.
Mais en gros, l'idée c'était que sa vie était ici maintenant, mais qu'il réalisait qu'il avait fait une bourde parce que contrairement à ce qu'il pensait a priori, les gens en ville, et à plus forte raison à Paris, n'ont pas plusse de sous qu'ailleurs.
ET je découvre que nous partgeons (surement avec bcp d'autres) le vice de la clope...
--> Hé oui, fort malheureusement... mais j'arriverai à arrêter, si si !
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