jeudi 16 avril 2009

La liste, 2 : Une toute autre

Je me suis demandé ce que je pouvais bien raconter ici à la même époque, les années précédentes. Alors en 2006, je faisais une balade à la Sainte Baume. En 2008, je racontais mon poids et ma fatigue de grosse femme enceinte. Et en 2007, je racontais que j'avais retrouvé une liste de choses dont j'avais envie lorsque j'avais 20 ans.


J'en ai 30 à présent. Je n'ai pas fait de liste. Je pourrais le faire, pour la retrouver à 40 ans... ou la comparer avec celle de mes 20 — dont j'avais à nouveau oublié l'existence entre temps.


Alors, disons que je voudrais, dans les 10 ans à venir (ça me laisse un peu de marge ;-)) :


  • Avoir eu deux enfants (vivants, autant que faire se peut) ;

  • Avoir appris à me faire confiance ;

  • M'être installée pour de vrai dans un endroit pour longtemps, sans avoir à me demander si je vais encore devoir bouger dans x temps ;

  • Avoir trouvé une activité, ou plusieurs, qui me rendent heureuse et, accessoirement, qui me permettent d'assurer mes besoins financiers ;

  • Avoir ancré dans ma vie ce plaisir que j'ai de donner aux activités le temps qu'il faut pour les faire bien ; le faire sans que ça soit un dilemme ;

  • Ne plus avoir à faire tant de kilomètres pour travailler ;

  • Avoir trouvé une lisière de clairière avec un grand chêne blanc sous lequel je pourrai aller me ressourcer lorsque l'envie m'en viendra ;

  • Avoir trouvé la paix, avoir su soulager, consoler, accueillir les démons qui se cachent sous mes paupières ;

  • Vivre dans un lieu bio, au fonctionnement le plus naturel possible ;

  • Avoir réussi à apprécier mon visage, à le prendre tel qu'il est, à ne plus être surprise lorsque je le croise aux hasard d'un reflet ;

  • Avoir appris à apprécier les petites contingences du quotidien, avoir trouvé une façon de les réaliser qui me convienne ;


Je pose ça là. Et on verra dans 10 ans.

5 Commentaires :

mowglinomade a dit...

Je n'ai pas encore eu l'occasion de te dire à quel point je suis heureuse de lire à nouveau tes mots.
C'est le chemin de la sérénité que tu décrit là, et c'est tout ce que je te souhaite.
Je suis frappée par la ressemblance de ta liste avec celle que je pourrais faire si je me preter au jeu. Apprendre a vivre avec son corps, son cerveau, son quotidien et son histoire, c'est difficile ici aussi. Les dilemmes, le boulot, les kilomètres, l'usure que je sens dans ces mots, c'est toute la mienne en ces moments d'incertitude galactique.

Après 300 kilomètres parcourus par jour pour aller faire cours dans une fac ou on ne m'a même pas donné un endroit pour manger à l'abri à midi, ou j'ai du échanger 15 mots par semaine avec les profs du cru et devant l'absence de perspective en France l'année prochaine, j'ai choisi l'option exit, l'attrait d'un campus américain. Et ce qui a determiné cette décision, c'est la perspective de vivre un semestre dans 5km2, sans voiture, sans kilomètres, presque sans objets, sans papiers, sans cette grisaille universitaire francaise, cette incertitude constante, ces multiples dépréciations et vexations....mais sans l'homme.

malie a dit...

Mowgli > Je me suis posé cette question aussi. De mon côté, j'ai refusé la perspective de partir ; je le ferais si j'étais assurée de pouvoir revenir dans de bonnes conditions, mais vu la situation actuelle ce n'est plus le cas, alors je reste. Malgré mes centaines de km qui me séparent moi aussi de mon lieu de travail, malgré la précarité de ma situation, malgré les difficultés de tous ordres. Mais je comprends ton choix aussi. Parce que j'ai hésité : loin, mais sacrément bien payée, dans une des meilleures équipes mondiales de ce que je fais, et pour quelques années (de tranquillité) dans mon cas.

Je suis contente de te lire moi aussi.

mowglinomade a dit...

Tu as raison, ce départ ne fait paradoxalement pas de bien à mon Cv et risque de rendre le retour plus difficile. Il eut mieux valu mettre un pieds dans une faculté de cette nouvelle région ou nous déménageons, ne serait-ce que comme ATER, pour que l'on retienne mon nom.
Mais mon corps a crié son refus des distances, du stress et de l'humiliation.
Disons que ces quatres mois de recherche intensive dans un environnement intellectuellement accueillant sans soucis pratiques (enfin....c'est déjà le bordel avec les assurances) me permettront de barrer une ligne de ma liste "à faire avant de renoncer définitivement à ce métier". Un chant du cygne, peut-être.

J'admire cette résistance, cette conviction et cette foi qui est la tienne. Tenir, une année de plus...

Céline Praline a dit...

Comme cela fait du bien de lire que d'autres partagent les mêmes interrogations. Mes trente ans ne sont pas encore là, les vingt-neuf sont juste passés mais les questions sont proches. Le premier poste universitaire fixe de mon mari, il y a trois ans a été un soulagement... mais seulement partiel : retrouver un poste proche n'a pas été possible et risque de ne pas l'être. Après quelques tentatives, on a fait (temporairement ?) une croix sur l'espoir d'un poste proche et on tente de construire une autre vie ici, avec un salaire mais plus de temps à passer ensemble, à donner aux autres, accompagner les premiers pas de notre fille et peut-être à un autre enfant dans quelques mois. J'en profite pour réfléchir sur notre mode de vie et son impact, désencombrer l'appartement pour faire de la place dans notre vie, faire évoluer notre alimentation, repenser nos achats ... avec le soutien de mon homme qui partage mes questions. Acheter une voiture et faire cent vingt kilomètres par jour pour aller travailler apparaît de plus en plus fou et l'idée de ne pas retourner travailler (ou de renoncer à ce travail pour une autre activité) fait peu à peu son chemin...

Je suis aussi heureuse d'avoir de tes nouvelles ici, Mowglinomade.

malie a dit...

Mowglinomade > (Que ton pseudo prend encore une nouvelle dimension avec ton présent d'aujourd'hui !)

Je crois que je comprends ce que tu veux dire. Quitte à penser ces années qui viennent de passer et peut-être encore quelques-unes à venir comme les dernières d'une (longue) série un peu à part, avant de passer à autre chose, autant y faire ce que l'on a réellement envie d'y faire. D'autant plus quand on en a les moyens.

Et quel dégoût je lis dans certaines de tes lignes. Un dégoût que je retrouve souvent chez moi aussi, même si nos situations diffèrent sur quelques points, qu'est-ce que c'est triste de lire autant de tristesse et de résignation alors qu'on vient à peine de commencer. Alors qu'on n'est pas les seules à avoir envie de construire quelque chose, quelque chose de grand, de fort, de passionné, et voilà qu'on nous coupe l'herbe sous le pied. C'est vraiment triste d'en arriver là.

Céline Praline > Effectivement, tu racontes toi aussi une autre expérience qui rejoins la mienne, et celle de Mowgli aussi. À se demander pourquoi l'on avait choisi ce chemin-là ! (dans l'ignorance, souvent — pas forcément volontaire, mais le résultat est le même)