dimanche 11 novembre 2007

Des courants de bien-être

Ça pourrait être l'épisode suivant les frustrants imprévus. J'ai attendu, attendu, bien plus que ce que je m'en pensais capable (sinon, quoi ?), bien plus en tout cas que ce dont j'avais envie.


Comme quand j'étais toute petite et qu'à l'approche de Noël je savais quand mes parents avaient été m'acheter les cadeaux que j'attendais. Quand les quelques jours (voire, semaines !) qui me séparaient de la découverte de mes nouveaux moments de jeux étaient pour moi une éternité, véritablement insoutenable alors que je savais si bien qu'ils étaient là, rangés en bas à gauche dans le placard de ma mère, et dès que j'en avais l'occasion volée je filais les y voir, m'imaginant à quel point ce serait bien de pouvoir enfin jouer avec. Je trouvais cela moins insoutenable que complètement absurde : tous les éléments étaient réunis déjà pour qu'un instant de joie intense se produise, mais l'on devait attendre parce que celui-ci devait coïncider strictement avec une date donnée du calendrier. La joie en était-elle plus intense ? Je ne l'ai jamais trouvé. Qu'est-ce que j'ai pu argumenter avec mes parents sur ce point, dans les faits moins que dans ma tête, afin d'arriver à leur faire admettre à quel point cette situation était absurde, et qu'il serait tellement plus logique, tellement plus évident d'en profiter dès que l'occasion se présentait plutôt que d'attendre ! Et d'attendre quoi d'abord, puisque de toute façon l'instant aurait lieu, alors à quoi bon le retarder ? Evidemment, ça ne marchait jamais. Et je ne saurais dire à présent si je le regrette ou pas, parce que ça n'a aucune importance : en revanche je sais qu'aujourd'hui, j'offre ce que j'ai envie d'offrir si tôt que j'en ai l'occasion, et peu importe le respect du calendrier.


Et quand je parle d'offrir, je parle aussi bien de cadeaux matériels que d'amour, au sens large. D'ailleurs pour moi il s'agit de la même chose : un cadeau que je veux faire, peu importe qu'il soit matériel ou non, ne doit pas attendre, ne peut pas attendre sinon il est comme un soufflé qui retombe ; à quoi bon attendre pour offrir un cadeau puisque l'on n'attend pas pour dire à quelqu'un qu'on l'aime (ou alors, c'est en tout cas quelque chose que je n'ai jamais pu accepter !). Et qu'est-ce que l'on pourrait bien attendre, d'ailleurs ? (Il y a plein de réponses possibles à cette question, réponses que j'ai entendues à maintes reprises, et jamais, jamais je n'en ai trouvé une seule justifiée.)


Donc après avoir passé un moment de joie intense avec quelqu'un, après avoir ressenti comme une bouffée d'amour qui se crée de manière tout à fait surprenante (parce que toujours, nécessairement inattendue), jamais je n'ai envie d'attendre pour que cela se reproduise. Qu'est-ce qui pourrait bien justifier une telle attente ? Je n'ai jamais trouvé de réponse qui me satisfasse, ni même qui me permette d'attendre sereinement, au moins. D'où la frustration des imprévus qui viennent temporiser mon bonheur, qui viennent retarder si injustement des flots de bonheur qui m'envahissent et gonflent mon cœur. Frustration et sentiment d'injustice : ce sont toujours, par définition, des événements futiles qui m'en empêchent, en comparaison de ce que j'ai à ressentir. L'amour, la joie, le bonheur sont toujours prioritaires sur tout, sinon la vie n'a plus de sens.


[ Cette dernière phrase, je devrai la relire plus tard. ]


Et cette primauté absolue est pourtant sans cesse violentée, ignorée, brimée par les faits. Parce que la vie, parce que le quotidien dans la vie, parce que le travail dans le quotidien et puis toutes les choses à faire et aussi le fait que le bonheur et l'amour ne coïncident pas toujours parfaitement : en l'occurrence, l'amour est multiplié par le bonheur de la nouveauté, de la surprise qu'il vienne apparaître là où l'on ne l'attendait pas. Alors tout l'amour que l'on ressent par ailleurs reste toujours là et tout aussi présent, mais c'est l'étourdissement de cette nouvelle rencontre que l'on veut retrouver, dont on veut profiter, que l'on veut sentir en soi.


Evidemment je parle là d'amour au sens large. Pas uniquement du "sentiment amoureux". Je tiens à le préciser (mais si je savais pourquoi...).


Il s'est passé plus de dix jours pour que cette suite de frustrants imprévus en finisse de mettre mon bonheur en veilleuse. J'avais un trac fou d'être déçue, de m'être fait une montagne. Et je me raisonnais en me disant que c'est mon ressenti qui compte pour moi, que ce qui est important pour moi c'est la façon dont je le perçois, que je n'ai qu'à agir, être en conséquence de ce que je ressens et que tout ira bien, que je ne peux pas être déçue par mon propre état et qu'il n'y a que lui qui compte en la matière. Mais rien n'y faisait : plus le temps passait plus j'étais saisie d'une peur de m'être mis le doigt dans l'œil, d'une peur de me retrouver face à une situation comme si la rencontre à laquelle je donnais une telle importance n'avait pas eu lieu. Combien de fois ça m'est arrivé, ce genre de chose ! Sans doute en (grande ?) partie parce que justement, je n'étais (n'agissais) pas conformément à ce que je ressentais.


Avec ma façon caricaturale de ne jamais être sûre de moi, je ne pourrais m'autoriser à affirmer que la rencontre s'est confirmée. Ce que je peux dire, c'est que j'ai à nouveau ressenti autant de bonheur. Je n'en demandais pas énormément finalement, je ne demandais pas des heures de conversation en tête à tête pour que l'on se raconte toutes nos vies et nos idées, mais je voulais juste pouvoir profiter des petits instants accessibles au quotidien pour porter un certain regard, avoir certains mots, dont je ne savais pas si la situation les permettrait. Et je ne sais pas si c'est la situation ou alors moi-même qui les ont permis finalement, mais j'ai pu le faire. Je ne saurais parler non plus de ce que j'ai reçu, parce que je n'oserais à aucun prix mettre des mots sur ce que je ressens des autres, mais ce que je sais c'est que j'en ai été heureuse. Heureusement surprise, encore une fois. Heureusement touchée. Comme une confirmation de confort, d'un confort dans ma possibilité, mon "droit" d'user de mon amour et de le prodiguer comme bon me semble. C'est très difficile pour moi. Mais ça a été tellement agréable.

11 Commentaires :

Anonyme a dit...

"... une confirmation de mon "droit" d'user de mon amour et de le prodiguer comme bon me semble"
Cela me réjouit ! Se sentir en droit d'exprimer ses sentiments ou de les dire, c'est une libération de soi, un vrai bien-être. Plein de bonheur pour toi.

malie a dit...

Meerkat > Alors là, je ne te le fais pas dire ! Quel soulagement... même si bon, ce n'est pas encore un réflexe acquis, loin de là.

Gregory Sey a dit...

C'est bien de ressentir du bonheur

Anonyme a dit...

Commes tes propos sont justes...C'est bien évidemment cette sté de consommation à outrance qui essait de nous pousser à acheter à l'instant T (et qu'ils sont nombreux ces instants..)et qui quelque part nous culpabilise si l'on agit différemment. Exemple; une personne de mon entourage "s'offusquait" que pour mes 40 ans, mon mari ne m'ait pas organisé une méga fiesta ou un acheté un "gros" cadeau. Pour notre part, depuis de nombreuses années nous nous faisons plaisir lorsque l'envie ou une occasion se présente, donc elle est restée muette lorsque je lui ai dit que que c'était au quotidien que mon homme m'accordait son attention et son amour et non pas dans des actes d'achat mais plutot dans du concret (genre gros bricolage qui demande de l'énergie et du temps)ou par sa gentillesse......

Moukmouk a dit...

Il me semble assez évident que la notion clé de ce texte est : le temps. Comme je le comprends le bonheur vient de l'équilibre et de la paix intérieur qui fait que le temps cet ennemi terrible, a peu de prise sur nous.

l'enfant est toujours dans l'attente. Quitter l'enfance c'est refuser que le temps ait prise sur nous et sur le monde. Bien sûr c'est un combat pratiquement perdu mais c'est le seul qui vaut vraiment la peine: la continuité du vivant.

malie a dit...

Imparfait présent > Tout à fait : comme le bonheur rend heureux ! ;-)

Anonyme > Hé oui... c'est souvent comme ça, vu de l'extérieur ça peut faire un drôle d'effet. Mais ce qui compte c'est de vivre tout ça au rythme qui nous convient, comme on en a envie.

Moukmouk > Waou, je n'y avais pas du tout pensé sous cet angle mais alors, oui, oui oui ! Et alors sur l'attente et la continuité du vivant, là tu touches un truc vachement important chez moi...

Anonyme a dit...

Il me semble que cette attente forcée peut avoir au moins une vertu : apprendre la patience ^^

malie a dit...

DDC > Non ! Je ne veux pas attendre ! Je déteste ça et j'veux pas apprendre !! ;-)

Anonyme a dit...

Et ça apprend aussi à gérer la frustration, ce qui me semble très utile voire vital dans la société où on vit ! (Tu ne vas pas me dire que tu soutiens les caprices du "tout, tout de suite et sans effort" ?)

malie a dit...

DDC > Si ! :-p

Non en fait, gérer la frustration, quand elle est matérielle, ça va sans problème. Et encore, quand il y a frustration... mais la frustration des sentiments, de l'amour, je suis contre !

Anonyme a dit...

Bien sûr, je parlais des cadeaux de Noël :)