samedi 30 juin 2007

De l'honneteté de l'enseignant

Hier donc, j'ai corrigé mes copies. Il s'agit d'étudiants en lettres, qui planchaient pour un cours d'initiation à l'informatique, qui se divisait en deux parties : une partie pratique sur machine (pas évaluée - du coup 80% des étudiants ont séché les séances dès lors qu'ils l'ont su), et une partie théorique en amphi, sur laquelle portait mes copies. Et c'était les copies de la session de rattrappage, celle qui a avait d'habitude lieu en septembre mais qui, à Bordeaux, est maintenant en juin (sachant que la session normale du 2e semestre était en avril).


Et en corrigeant mes copies, j'ai arroché sur l'une d'elles. Faut dire, je prends toujours du temps pour expliquer à mes étudiants que dans une copie d'examen, la forme, ça compte pour beaucoup : je leur explique qu'ils doivent se concentrer un minimum pour rédiger correctement, des phrases simples (pas toutes allambiquées), en limitant le plus possible les fautes d'orthographe et de grammaire (donc en se relisant attentivement), en proscrivant les abbréviations, et en n'utilisant que des mots dont ils sont certains du sens (question de ne pas se retrouver avec une foire aux néologismes et aux absurdités).


Et le plus souvent, à force de leur expliquer qu'ils peuvent tous le faire et que ce n'est qu'une question de concentration, ils y arrivent tous à peu près. Bon. Sauf qu'évidemment, il y a toujours quelques rares exceptions, des gens qui ne savent vraiment pas écrire du tout. Et c'est ce que j'ai trouvé dans mon paquet de copies cette année. J'avais déjà noté sa copie lors de l'exam d'avril, je me souvenais de son écriture. Et là je l'ai retrouvée. Je vous mets un extrait :


Un sistème de numération sont par ex les abaques. Les boulier qui sont efectué par des barre puis des billes que lon déplasse. Les Romain utilise se que l'on appelle les nombre romain. Les diferante basse sont également des sistème numérique.

Cette personne, je le rappelle, est en première année de fac de lettres. Et je ne veux en aucun cas lui jeter la pierre pour son problème d'écriture qui, c'est évident, ne relève pas d'une simple question de concentration : elle n'a vraisemblablement jamais compris la logique d'une transcription écrite (même avec une lecture phonétique c'est faux). Elle ne connaît pas l'orthographe des mots, ne connaît pas la syntaxe du français, et ne sait pas rédiger des phrases simples qui aient un sens.


C'est grave. Et ce qui est grave, c'est que ça n'est pas de sa faute : si elle ne le sait pas à son âge, c'est qu'on ne lui a jamais appris. Et pire, si elle est arrivée jusqu'à une fac de lettres avec un tel handicap, c'est qu'on lui a fait croire que ça n'était pas grave, que l'écriture ce n'était pas important.


Et là je m'interroge. Comment est-ce que cette personne a pu passer autant d'années à l'école et que jamais personne ne lui ait dit qu'elle devait commencer par apprendre à écrire ? Que même si elle n'allait pas à l'université ce n'était pas grave, pas aussi grave que de ne pas savoir écrire ? Comment est-ce qu'elle va faire, cette personne, pour rédiger une simple lettre de motivation pour trouver un job ? Comment est-ce qu'on peut consciemment abandonner des gens de cette façon alors qu'on est des enseignants ? Comment est-ce qu'on a pu être assez malhonnêtes, tous, pour la laisser arriver là sans jamais lui apprendre à écrire, ou à défaut lui dire qu'elle devait apprendre ? Que c'était un minimum pour s'en sortir ? Que la fac était une perte de temps pour elle si elle n'avait pas les bases ?


Je ne comprends pas.


Je lui ai envoyé un mail pour lui dire ça. Si j'avais été sur place j'aurais essayé de trouver ses coordonnées pour la rencontrer, et j'aurais pu l'aider à apprendre. Parce que je trouve ça important, primordial, même, quand on est enseignant, et on n'est pas là pour fermer les yeux sur ce qui ne concerne pas notre petit domaine personnel d'enseignement. J'ai essayé de bien lui expliquer que je ne la tenais pas pour responsable, mais que je lui disais ça pour son bien à venir (et même présent). J'espère qu'elle lira ce mail, et qu'elle comprendra, et qu'elle se sortira de l'évidente impasse qui l'attend pour l'instant.


27 Commentaires :

Anonyme a dit...

ça n'a pas du être un mail facile à écrire, mais je t'admire de l'avoir fait. Ce genre de chose est terrible pour tout le monde : pour la personne concernée, pour ses collègues étudiants (les bons, parce qu'ils n'ont pas droit au niveau d'enseignement auquel ils peuvent prétendre si le prof doit se mettre au niveau des plus faibles, les moins bons, parce qu'ils ne progresseront pas), le système scolaire dans son ensemble, et finalement toute la société...

Anonyme a dit...

J'ai l'impression de retrouver certaines copies de 5� ou 4�... et c'etait deja trop tard bien souvent car le decouragement de l'eleve etait enorme. comment a-ton pu l'accepter au BC ou au Bac ? et dire qu'avec les lois qui vont sortir le barrage en fac ne se fera qu'en 4� annee si j'ai bien compris, quelle misere! quelleS demissionSSSS successives cela laisse suposer...

Anonyme a dit...

Je ne suis pas étonnée parce que la préoccupation de l'Education nationale est plus la gestion des flux d'élèves que la transmission du savoir et des connaissances. Il y a un énorme hiatus entre les objectifs des dirigeants qui encadrent le système et ceux des enseignants. L'orientationest d'ailleurs de plusen plus incohérente. Enfin, pour avoir travaillé en lycée, je peux attester que dans certaines sections ( littéraire avec option cinéma par exemple), l'on peut être inculte et disorthographique et obtenir son bac L grâce à l'option cinéma. Les portes de la fac de lettres sont alors grandes ouvertes au malheureux étudiant.

Mimille a dit...

Marie > Merci. Mais il n'y a pas d'admiration à avoir, c'était le moins que je pouvais faire, et finalement je trouve que ça n'est pas grand-chose.

C'est vrai que c'est terrible pour tout le monde. Ce que je regrette, parce que l'ai eu en cours magistral, c'est de ne pas avoir pu évaluer leur niveau en cours de semestre, j'aurais pu m'en rendre compte avant l'examen et voir ça avec l'étudiant directement, tant que je l'avais sous la main.

En fait plus ça va et plus je pense que c'est une énorme connerie que de faire des cours magistraux aux étudiants de première année, pour cette raison-là, entre autres choses. mais que veux-vous, vu qu'on est de moins en moins d'enseignants il faut bien faire comme on peut :-/

cohelasco > (décidément c'est de plus en plus compliqué ton pseudo-changeant ;-)

En lisant ce genre de copie, oui exactement, j'ai l'impression de lire une série de perles d'élèves de primaire... et ce n'est pas rassurant. Mais je ne veux ps penser qu'il est trop tard, jamais, parce que même si plus on s'y prend tard plus c'est long, on peut toujours apprendre. Au moins un minimum.

Dans mon cours de méthodo de 1ere année jusqu'à l'an dernier je leur faisais étudier un texte qui parlait de la façon dont les enseignants les reprenaient de moins en moins sur leur orthographe, afin de ne pas "brider leur expression" soit-disant. Ça les faisait beaucoup réfléchir, c'était donc tout bénef' pour ce que je voulais leur faire comprendre ;-) Et puis je pense que c'est une sacrée erreur de ne pas leur faire prendre les bons réflexes tout de suite, parce qu'après, non seulement ça leur demande plus d'efforts, mais en plus, justement, ça bride leurs possibilités (de comprendre des notions de plus en plus complexes, notamment).

Enfin bref... il y aurait tant à dire ! Et j'ai déjà répondu une tartine ;-)

Oxygène > Tu as raison sur la différence entre les préoccupations de l'EN et celles des enseignants. Mais bougre de bigre, ce sont des enseignants que cet étudiant a cotoyé pendant toute sa scolarité ! Alors qu'on-t-ils fait, tous ceux-là, pour l'aider, pour lui expliquer les choses, pour le faire avancer ?

Anonyme a dit...

Je crois que je peux répondre sur ce qui a permis que cet élève aille jusque là : il est interdit (oui oui, j'ai bien dit interdit) aux enseignants d'évaluer hors des critères imposés. Par exemple, on n'a absolument plus le droit de retirer des points sur une copie de sciences naturelles pour expression déficiente. Mais on n'a pas le droit non plus de retirer plus de deux points sur une copie de français... Du coup ben on peut avoir son bac en replissant toutes ses copis en langage SMS si on le souhaite.
Et puis certains enseignants on peut être voulu l'aider spécifiquement mais cela non plus n'est pas possible la plupart du temps : il faut que l'élève le veuille et surtout qu'il ne parte pas trop vite. Parceque les passages d'une classe à l'autre sont bien souvent de droit et les redoublements ne peuvent de toute façon pas être cumulés. Alors assez rapidement les lacunes de l'élève sont en complet décalage avec ce que le prof doit faire en cours. Assez rapidement l'élève qui a décroché "désapprend". J'ai déja vu le cas d'un élève,17 ans et en troisième qui ne savait plus compter (et on a retrouvé les tests qu'il avait fait à l'entrée en sixième, sont niveau était très bas mais à l'époque il savait tout de même faire des additions). Au bout d'un an de suivi particulier (et bien entendu non pris en charge par l'EN, uniquement sur le bénévolat des enseignants) il avait un tout petit peu repris pied mais il est sorti du collège pour aller en BEP. Le suivi aura-t-il été assuré par la nouvelle équipe enseignante ? J'ai des doutes compte tenu de l'investissement en temps que cela demandait.

Bref c'est dommage tout ce gachis mais on ne peut pas demander aux enseignants de toujours devoir se battre contre le système. Si on veut que ce genre d'élèves soient aidés il faut prévoir une structure adaptée, laisser du temps aux profs de s'en occuper...

Anonyme a dit...

Il y a des formes graves de troubles de l'orthographe que les enseignants ne peuvent pas et ne savent pas corriger. Dans l'académie de Grenoble, ces élèves sont dépistés et orientés vers des professionnels, parfois même en milieu hospitalier. Sinon, l'on constate tous les jours que le Français n'est plus une discipline fondamentale. Son statut dans la société et au sein de l'institution scolaire ne cesse de se dégrader. Que des profs n'aient pas fait leur boulot, c'est vraisemblable, mais est-il possible de le faire correctement pour tous?
PS: Dysorthographique , bien sûr..Jolie perle n'est-ce pas?

Mimille a dit...

t.w. > Je n'en reviens pas sur ce que tu dis ! Effectivement, dans ce cas, certains élèves peuvent passer d'une année à l'autre, simplement parce que le temps passe. Et effectivement la personne en question a 4 ans de retard par rapport à l'âge standard de sortie du bac.

Mais tout de même. Je me dis que ce n'est pas parce qu'un élève change de classe et donc de prof, que si un enseignant a décidé de l'aider, il doit le laisser tomber. Je sais bien que ça prend du temps ! et que ça n'est pas prévu dans le salaire. Mais ce job est l'un des plus importants qui existe pour une société qui pratique l'école. C'est trop important pour laisser ce genre de chose arriver. Cette pauvre gamine, elle est en train de perdre son temps pour rien ! On l'a laissée gâcher sa vie, comme ça, en la voyant passer, peut-être ponctuellement en l'aidant un peu, mais apparemment pas assez, et maintenant elle va faire quoi ? Evidemment qu'il y a des gens qui s'en sortent dans toutes les conditions, même sans savoir lire, j'en ai connu un. Mais à quoi bon la laisser croire qu'elle va s'en sortir à la fac ? Même si certains des enseignants ne lui enlèvent pas trop de points pour son expression écrite (alors que nous, on applique les barèmes qu'on veut, moi ça m'arrive d'enlever 5 points pour l'orthographe suivant les exercices), de toute façon on voit bien qu'elle n'accède même pas aux contenu des cours. Même si on passe sur son orthographe, de toute façon elle n'a pas les outils pour comprendre le cours, alors elle ne s'en sortira pas. Elle va tenter, un an, deux ans, trois ans... peut-être plus ? A quoi bon si elle ne rattrappe pas son retard basique ?

C'est vraiment un problème de fond. Au-delà de ce que nous demande notre contrat d'enseignant, je veux dire. Je vis sa copie comme un échec dans mon procédé pédagogique : j'aurais dû faire en sorte de pouvoir réaliser ce genre de problème dès le début du semestre. Si je ne l'ai pas fait et que je n'ai pas pu l'aider à temps, c'est ma faute, et c'est elle qui en pâtit. Je ne conçois pas ça comme une bataille contre le système, mais plutôt comme un combat pour aider les gens avec lesquels on vit, d'une manière générale, parce que nous, on a les outils, alors c'est normal de les transmettre du mieux qu'on peut aux plus jeunes. D'ailleurs ça ne vaut pas que pour les profs évidemment ; mais les profs ont souvent, quand-même, une notion presque "naturelle" de ça.

oxygène > Dysorthographie, oui, fort possible en effet. Auquel cas, de la même façon, ça n'explique pas comment elle a pu se retrouver en fac de lettres. Un jeune dyscalculique ne tiendrait pas plus de quelques jours en fac de maths, alors pourquoi donc est-ce qu'on considère que les problèmes d'écriture ne sont pas un problème pour faire une fac de lettres ?

Pour l'instant, la plupart des jeunes enseignants universitaires sont d'une génération où l'on apprenait encore à faire l'effort de ne pas faire de fautes quand on écrit. Je me demande ce que ça donnera dans 10, 20 ans, quand ce seront ces étudiants-là, les enseignants de nos (petits-)enfants. L'orthographe aura évolué, certes, ce n'est pas le problème ; ce qui me pose un problème là-dedans c'est l'apprentissage de la concentration, l'apprentissage étant jeune d'un système. Si ça disparaît, comment le reste sera-t-il possible ?

Bon bon bon...

Anonyme a dit...

J´ai cotoyée beaucoup de personne qui ne maitrisaient pas correctement la langue francaise. Beaucoup d´entre elles en étaient conscientes. Durant mon passage éclair en fac, j´en ai vu aussi. Personnellement de ce coté ca allait, mais je n´avais (et je n´ai toujours pas) aucune maitrise du commentaire littéraire. Une défaillance au lycée, un prof qui largue sa classe de 2nde au profit d´une classe prépa. Une classe de 2nde qui débute sans prof de francais. Puis enfin le miracle, j´ai entendu parler des port-royalistes 5 mois apres le brevet. La suite n´est guere mieux. Tout ca pour arriver en fac, un monde inconnu, sans AUCUNE préparation. Pourquoi ne pas tester les éleves a leur entrée en fac? Ceux qui n´aurait vraiment pas le niveau iraient dans l´année "0", sorte de remise a niveau, avec possibilité de passer les exams de l´année 1 quand meme? Avec un systeme de passerelle, cela devrait pouvoir fonctionner non?

Anonyme a dit...

Cette étudiante n'est peut-être pas de langue française? Un texte en français ne lui pose probablement aucun soucis à lire mais pour ce qui est d'écrire... J'ai le même problème avec l'anglais.

Mimille a dit...

Suzie > Tout d'abord bienvenue ici :-)

Hé bien, pourquoi ne pas tester à l'entrée de la fac, pour plusieurs raisons. Notamment, pragmatiquement parlant, parce qui s'en occuperait ? Ensuite, parce que théoriquement le bac est censé être ce test...

L'année 0 et les passerelles ça existe dans quelques facs (beaucoup ? je ne sais pas), mais c'est sur la base du volontariat il me semble. Je n'y connais pas grand-chose en année 0.

Cela dit, avoir du mal en commentaire composé, ce n'est pas un hyper gros handicap pour la suite... enfin, suivant ce que tu fais : si tu veux être critique littéraire ça risque d'être un peu gênant mais sinon, bof ;-) Mais là il s'agit simplement d'écriture, toute simple, c'est très différent.

Pousse manette > Oui, peut-être, je me suis posé la question, mais honnêtement je ne crois pas. D'une part parce qu'elle ne fait pas le genre de fautes typique des étudiants de langue étrangère. D'autre part, et plus généralement, parce que si elle était de langue étrangère elle aurait dû le signaler... il y a des trucs prévus pour ces étudiants. De même, pour revenir à ce qui a été dit par Oxygène, si elle est dysorthographique je pense qu'elle aurait dû au mieux venir me voir en cours pour le signaler, au pire le noter sur sa copie. S'il y a quelque chose qui la handicape a priori nettement plus que les autres pour composer, un premier pas possible serait de le reconnaître comme un handicap, non ?

Gregory Sey a dit...

Ouais mais tu te rends compte, tu leur demandes d'écrire en langue normale.
Eux il ne font pas de fautes en langage SMS, tu vois...

Anonyme a dit...
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Anonyme a dit...

Je vous propose quelquechose � (voyez ce que cela donne mes accents !) tous et toutes qui �crivez ici (moi compris);
Commen�ons (les accents , les � etc,ne passent pas sur mon imac; allez savoir pourquoi ! il est aussi vieux que moi sans doute). Oui, commen�ons par essayer nous-m�mes ( qui enseignons ou avons enseign� ou quelque chose d'approchant)) de ne plus laisser passer une seule faute sur ce blog( oui, vous allez me dire, le rythme de la pens�e , la spontan�it� en p�tiraient) taratata.... relisons-nous, toutes autant que nous sommes et vous serez frapp�es... moi en tous cas �a me frappe et m'inqui�te... ce laisser-aller de la langue �crite sans parler bien s�r du style sms. Quand je demandais � mes secondes il y a trois ans ce qu'ils avaient lu pendant les vacances, histoire de m'int�resser � leur go�t propre ; sur 29 aucun n'avait rien lu , l'un m'a r�pondu, si mes textos...
On ne lit plus, vous le savez autant que moi,. Voil� une des principales raisons de la disorthographie.
-J'ai corrig� une faute -

Anonyme a dit...

Hey, cet article m'interpelle puisque c'est un peu mon domaine ; j'ai pas le temps d'écrire beaucoup, il est tard mais j'abonde amplement dans le sens de t.w. et j'enchéris : j'ai corrigé le brevet (en maths) et la rédaction, point pourtant fondamental en maths (capacité à organiser et présenter sa pensée), n'avait droit qu'à un misérable point dans le barême (sur 40). Par ailleurs, il fallait mettre des points dans certains cas de rédaction non seulement mauvaise mais mathématiquement fausse... et la rigueur dans tout ça, hein ? Les collègues de français ont rapporté des nouvelles navrantes du même genre (faible importance de l'orthographe dans le barême etc.) et les collègues d'histoire ont rapporté que dans le § argumenté deux points étaient réservés aux connaissances (sur 10 points) càd qu'en n'apprenant pas ses leçons d'histoire on peut encore avoir 8/10 à cet exercice ! Bref c'est une illustration désolante de l'abandon de toute exigence au collège. On entretient les élèves dans l'illusion... et avec le socle commun, c'est parti pour durer dans le même sens. Ah la la, faut la foi, je vous dis. Mais moi je suis fier parce que j'ai constaté la progression tout de même de quelques uns de mes élèves cette année : ils comprennent plus vite des choses plus dures et ça qu'est-ce que c'est gratifiant ! Et c'est ça le but même si pas beaucoup de gens comprennent, ouais, les maths ça sert à rien, ouais, à rien dans la vie quotidienne j'utilise pas le théorème de Pythagore. Oui, à rien, sauf qu'à force d'en faire et de se creuser la tête dessus, ben on comprend plus vite des choses... c'est un peu comme si ça rendait plus intelligent, en quelque sorte. Et ça, socle commun ou pas, inspecteur new age ou pas, ràf, je poursuivrai toujours cet objectif. Je ne baisse pas mes exigences et je les emmène le plus loin possible mes élèves. Mais oui, c'est se battre contre le système et les idées idiotes de penseurs bureaucrates cachés dans des sphères trop loin de la réalité. Bref.

Tiens un petit coucou à toi Mirza, en passant, que je n'ai pas croisée depuis un bail :o)

Mimille a dit...

Imparfait présent > Tu sais, maîtriser plusieurs systèmes d'écriture, ça n'est ni difficile ni problématique. A l'oral, ils sont tout à fait capables de comprendre qu'ils ne doivent pas toujours parler de la même façon, suivant les contextes dans lesquels ils sont. A l'écrit c'est pareil, sauf qu'apparemment les profs n'ont plus le droit de le leur faire remarquer... et c'est ça qui est triste. La fait qu'ils sachent écrire en SMS ne change rien au problème, en fait : tous les jeunes développent des façons originales de s'exprimer, c'est signe qu'ils s'approprient la langue, c'est positif. Positif à la condition que nous, on leur fasse bien comprendre que ce sont deux systèmes différents.

Mimille a dit...

co(re)co > Au moins, ils ont de l'humour ! ;-)

D'après les spécialistes de la question, justement, il paraît les gens d'une manière générale lisent de plus en plus, les enfants y compris. On a même constaté qu'il n'y avait pas de corrélation entre le fait de lire et celui d'orthographier correctement. Evidemment, la dysorthographie c'est autre chose, là il juste question de se concentrer sur ce qu'on écrit et de mettre en oeuvre des connaissances que l'on a.

Mon amie bordelaise, par exemple, a appris à l'école à faire l'effort d'écrire sans faute, et du coup sauf inattention (justement !) elle n'en fait pas. Moi c'est la même chose. Mais son mari, lui, n'a pas appris ça ; alors même s'il a aussi bien appris que nous deux à écrire correctement, il n'a pas le réflexe de le faire, et il fait des tas de fautes. Il faut qu'il s'oblige à se relire activement pour se corriger, alors que nous, en général, on s'en sort à peu près dès le premier jet. Une question de réflexe d'attention, que je dis ! :-)

Mimille a dit...

Diable moëlleux > Je suis bigrement contente de te lire ici ! Ça fait un sacré bail, oui ! C'est Pim qui t'a donné l'adresse ?

Je suis parfaitement d'accord avec ce que tu écris, et même que ça me fait rudement plaisir de lire toute la partie sur comment tu concilies tes obligations contractuelles (et le contenu des programmes) avec ce que tu entends par enseigner, toi-même.

A vous lire, les profs de collège / lycée, je me dis que je suis bien contente d'être dans le cycle universitaire où l'on n'a ni directives ni programme : de cette façon, certes on peut avoir du meilleur comme du pire, mais au moins on peut s'organiser à peu de choses près comme on veut, et ça c'est génial. De cette façon je sais que dans ma prochaine expérience d'amphi (là, c'était la première fois que je le faisais), il faudra que je teste mes étudiants dès le début du semestre, et que je m'adapte en fonction de ça. Et que je mette en pratique les quelques exercices que j'ai appris dans ma formation pour rendre les étudiants actifs même quand ils sont 200 dans un amphi obscur à 8h du matin à devoir suivre un pauvre cours qu'on leur impose mais qui n'a rien à voir avec leur formation (là c'était initiation à l'info. pour des étudiants d'espagnol...).

Ah oui, un PS pour Coco : Si ça se trouve tu en avais dans ta classe, des 2ndes qui avaient lu des trucs, mais peut-être que 1/ ils avaient honte de le dire devant les autres parce que personne ne répondait, et 2/ ils avaient honte de te le dire à toi, parce que tu étais leur prof de français et qu'ils avaient peur que tu juges leurs lectures trop nulles. Sait-on jamais, c'est tout à fait possible.

Anonyme a dit...

coreco: J'ai beaucoup lu etant jeune, et je lis encore beaucoup, pourtant je suis une vraie bille en ortographe.
Il me faut un effort de concentration et de relecture important pour éliminer 80 % de mes fautes. Mais il en reste toujours...
Un vrai handicap au boulot.

Anonyme a dit...

Mirza, je ne disais pas que les profs abandonnaient leurs élèves lorsqu'ils changeaient de classe mais bien lorsqu'ils changeaient d'établissement (les élèves pas les profs). Cela arrive souvent (parfois plusieurs fois dans l'année) parceque générallement ces jeunes ont d'autres soucis en dehors de leurs difficultés scolaires. Et en plus, pas de pot, génrallement ce genre de cas sont concentrés dans le même type d'établissement. Du coup certains profs en ont régulièrmement une poignée par an, d'autres n'en verront plus jamais passer.
En tout cas moi c'est sur on ne me verra pas utiliser mon droit à aller enseigner en lycée... ils n'avaient qu'à ne pas me dire que la division n'était pas une compétence exigible au bac. A la fac au moins, jusqu'ici du moins, j'ai le droit d'avoir ce genre d'exigences exorbitantes envers mes étudiants.

Et puis mea culpa pour mon orthographe un peu laxiste coreco. Le fait d'enseigner les sciences peut-il me donner un petit bonus d'excuses (c'est bien connu tout de même qu'on ne sait pas parler français) ?

Anonyme a dit...

yep, mirza, c'est Pim qui m'a laissé l'adresse de ton blog griffonée sur un bout de papier qui traînait sur mon bureau. Tu sais qu'il traverse actuellement la France à vélo ? Eh eeeeeeeeh. Ce Pim... quant à moi c'est pour raison de voyages nombreux que je ne suis pas prêt de laisser à nouveau un message ici, mais ça viendra. bon blog et bon été à tout le monde ! bye
PS désolé de mettre ça en commentaire mais en fait j'ai pas ton adresse e-mail

mowglinomade a dit...

C'est vrai qu'il y a un (des) probleme(s) de systeme.
Ma petite soeur est dyslexique (très) et je l'ai accompagné durant son lycée. Il y a une vraie souffrance de la part de l'élève, dont le niveau scolaire est souvent le seul critère pour s'évaluer (donc je suis nulle en classe = je suis nulle tout court), et une incroyable méconnaissance du problème de la part des profs. A une prof de français en première a qui elle a été signalé son probleme, celle-ci lui a repondu : "quel rapport avec vos problemes de poids? on ne va pas faire de favoritisme non plus" (et oui, il y a encore des des profs de FRANCAIS qui confondent dyslexie et anorexie). De plus on lui a refusé un tiers temps au bac, et demandé à ces élèves de se relire alors qu'il n'ont en général même pas le temps de faire la moitié de ce qui est demandé est inutile.

2) je ne comprend pas bien cette idée d'un "nombre de points pour l'expression". L'expression est intimmement liée au fond, et dans ke cas de Mirza, je suis incapable de dépasser la forme pour essayer de comprendre le sens de ce que dit l'élève sur un paragraphe. Alors sur une copie!!! POur moi, c'est zero sur la forme comme sur le fond.

3) c'est vrai que le systeme ne pousse pas à se relire. Bien qu'ayant fait de longues études (trrrès longues même pas terminées encore), une ENS, j'ai toujours été nulle en orthographe et en grammaire, par distraction je pense . j'ai commencé a me relire uniquement le jour ou un prof m'a squizzé systematiquement trois points pour l'orthographe.....Ca avait toujours l'air tellement plus gratifiant d'être "bonne sur le fond", peut importait la forme tant que c'était lisible.

Mimille a dit...

Mema > Finalement, ton compentaire abonde dans mon sens (ouf, me voilà rassurée). Je crois que c'est vraiment une question de réflexe à avoir acquis étant jeune, en même temps qu'on apprenait à écrire. Tu as eu des problèmes dès le début ou bien c'est venu petit à petit ?

Et que ça soit un handicap, ça prouve bien à quel point c'est important.

t.w. > Mille excuses, effectivement je n'avais pas compris !

Je vois qu'on est bien d'accord sur la liberté que l'on a à enseigner en fac, par rapport aux profs en collège / lycée.

...et pour le bonus d'excuses : c'est non ! :-P

Diable moëlleux > Oui j'étais au courant, il m'a envoyé un mail juste avant de partir. Sacré Pim !

Hé bien, fais de bons voyages et reviens faire un tour ici quand tu rentres :-) (et pour mon adresse email, si tu veux, tu peux la trouver dans mon profil sur le forum de simplicité volontaire de Cassandre)

Mowgli > Ça aussi c'est incroyable, le coup de la prof de français. Et le rapport vite fait entre être nulle à l'école et être nulle tout court, oui, c'est malheureusement un raccourci fréquent. Et pour le tiers temps j'hallucine aussi, je croyais que c'était officiellement reconnu comme un handicap, et donc que c'était un droit acquis.

2/ Pour forme vs. fond, je crois que dans le cas d'une copie où il a juste quelques fautes d'inattention c'est beaucoup plus facile à distinguer que dans un cas nettement plus grave, comme celui que j'ai présenté. Sinon, quand c'est uniquement quelques fautes d'accord et des infinitifs à la place des participes passés, ça ne gêne pas profondément l'accès au sens. Tandis que dans le cas que j'ai donné, je ne sais même pas s'il y a un sens au fond, en fait ; je ne connais pas assez ce genre de problème pour savoir comment ça fonctionne, au juste, si elle écit des phrases juste parce qu'on lui demande mais qu'elle ne sait pas comment on fait, ou bien si elle pense, elle, que ses phrases ont un sens. Il faudrait que je me renseigne plus avant sur la question.

3/ Hé oui... et comme c'est de plus en plus souvent le cas, c'est la raison pour laquelle je leur enlève jusqu'à 5 points pour l'expression (orthographe, grammaire, stylistique) : ça les oblige à faire attention, et dans l'extrême majorité des cas, ça fonctionne. (Sauf handicap particulier, donc) Je prends aussi le temps de leur expliquer que s'ils ne font pas gaffe à la forme, ça énerve les correcteurs et que de toute façon ils y perndent des points au final, et ils y perdent aussi de la considération de la part des enseignants.

Anonyme a dit...

Je sais bien qu'il existe plethore de livres sur ces questions, mais comme je constate, a vous lire, que le probleme de l'orthographe mal acquise a l'ecole devient le reflet d'un net pb d'integration, de construction de la personne, un pb sociologique, physiologique, relationnel et psychologique etc. Il serait tres urgent a mon sens que des gens comme vous se mettent � etudier serieusement la question aujourd'hui, et que les etudes linguistiques ( par ex ) fassent appel aussi a de vraies connaissances de la psychologie des jeunes aujourd'hui, pour comprendre leur vrai langage et la langue qu'ils utilisent pour se faire comprendre. On n'a jamais tant communiqu� qu'aujourd'hui, portables, blogs, tchats, et on n'a jamais non plus ete plus solitaires et seuls dans notre monde qu'aujourd'hui.... Alors , que peut-on faire a notre niveau, aujourd'hui ?

Mimille a dit...

Oh mais ça se fait, ça se fait, ne t'inquiète pas ! :-)

Par contre, à propos de "on n'a jamais autant communiqué qu'aujourd'hui", m'est avis que ça ressemble plus à un slogan publicitaire qu'à une vérité objective. Je ne crois pas du tout que l'on communique plus ou moins qu'avant, on communique avec des média différents, c'est tout.

Mimille a dit...

Addendum pour coco (et d'autres s'il sont intéressés) : il y a notamment Nina Catach qui s'est fait une spécialité de ces questions.

Anonyme a dit...

Bonjour, j'aimerai répondre à mon tour parce que je suis enseignante "en dessous", en cp-ce1.
A l'école élémentaire, les élèves ne peuvent redoubler qu'une seule fois. Un enfant redouble son ce1 parce qu'il ne sait pas faire une addition, ni écrire des "phrases syntaxiquement correctes" (c'est à dire mettre points et majuscules au bon endroit), ni identifier un sujet simple... Peu de compétences en calcul, en production d'écrits et en grammaire... Malheureusement, cet enfant a des soucis personnels, et son comportement s'en ressent grandement en classe. Pour parler poliment, il perturbe et il ne travaille pas!
Il passera tout de même dans les classes supérieures, avec ce décalage grandissant entre ses compétences et les exigences du programme. On se focalisera sur son comportement, en regrettant qu'il ne puisse être suivi... (mais le rased = soutien scolaire ou psychologique n'existe plus ou bien est réduit à peau de chagrin; les 28 ou 30 élèves par classe au lieu des 22 avant fermeture de classe réduisent le temps disponible pour s'occuper d'un enfant....)
Alors quoi?

Faut-il "bloquer" cet enfant en élémentaire jusqu'à ce qu'il maîtrise les compétences de base, ou bien faut-il développer les solutions alternatives au collège unique?

Mimille a dit...

Bonjour Caro et bienvenue ici !

Je suis contente d'avoir le témoignage et l'avis d'une enseignante de primaire, c'est super intéressant.

"Faut-il "bloquer" cet enfant en élémentaire jusqu'à ce qu'il maîtrise les compétences de base, ou bien faut-il développer les solutions alternatives au collège unique?"
--> Personnellement, je crois que ni l'un, ni l'autre. Dans l'absolu, c'est toute la notion de formation qu'il faudrait repenser autrement. Redéfinir les objectifs si besoin, et surtout s'y référer plus souvent, ne jamais les perdre de vue. Rajouter des personnels au lieu d'en supprimer me semble être un besoin essentiel et crucial. Sans temps, ni moyens, ni droit, évidemment tout ça ne peut mener à rien d'efficace, et par conséquent à rien de bon (et même à pas mal de mauvais).

Concrètement, pour répondre à tes questions, je pense qu'il faudrait pouvoir passer plus de temps avec ces élèves qui ont des problèmes d'apprentissage. Plus de temps pendant l'année, sans nécessairement les faire redoubler. Ça signifie plus de monde pour les encadrer, puisqu'un seul enseignant ne suffit pas, c'est évident.