vendredi 11 mai 2007

Tourves et le chateau de Valbelle

Mardi après-midi, il y a du mistral. Mais pas trop non plus, juste un peu, juste de quoi dédager les couleurs du ciel. Alors on est allés faire un petit tour à Tourves, là où coule le Caramy. Ça faisait longtemps que l'on passait devant sans jamais s'arrêter.


Les ruines du château.


Tourves existe au moins depuis le 4e siècle. Il était constitué de trois villages (Gueillet, Seysson et Saint-Sauveur), dont un seul a finalement subsisté, mais a été déplacé.


Un champ de mini-plantains dans le parc au pied du château.


Le village est en contre-bas, ce qui est plutôt inhabituel pour le pays. Je dis en contre-bas, parce qu'il est dominé par une colline, et que sur cette colline, il y a la ruine d'un château : le château de Valbelle, et c'est précisément lui que l'on était venus voir.


La façade de l'ancienne écurie.


Ce château de 2500 m2 est un bâtiment d'origine médiévale, devenu résidence du mécène Joseph-Alphonse Omer de Valbelle vers 1770, et qui l'avait fait aménager pour en faire un "temple dédié au goût, au plaisir et aux arts" entouré de six parcs.


Dans les jardins, une plante inconnue.


Ce palais fut construit, au XVIIIe siècle, dans ce site étrange par le très haut et très puissant seigneur Joseph-Alphonse-Omer de Valbelle, comte d'Oraison, des vicomtes de Marseille, marquis de Touvres, Rians, Montfuron et Bressiure, baron de Saint-Symphorien et de Meyrargues, comte de Valbelle et de Sainte-Tulle, vicomte de Cadenet, seigneur de Cadarache, Rougiers, Venel, Peyrolles, Mousteyret, Levens, Le Revest, Cucuron et autres lieux, l'un des quatre premiers barons du Dauphiné, lieutenant de roi en Provence au département d'Arles, maréchal de camp des armées du roi, et qui est surtout célèbre, dans la chronique galante de son temps, pour avoir été, dix-neuf ans durant, l'amant de Melle Clairon.

-- André Hallays, En flânant..., 1903.

Murs intérieurs de l'ancienne écurie.


Accessoirement, l'une des épouses (marquise !) Valbelle était Suzanne de Fabri, donc de la même famille que... Nicolas Claude Fabri de Peiresc, dont j'avais parlé il y a quelques temps. Le monde de l'aristocratie Provençale est décidément petit, tout petit.


Pyramide dans un jardin, imitation de celle de Sextius à Rome.


Intérieur de la pyramide.


Et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle le village (le castrum de Torrevès) est en contre-bas : Valbelle a fait déplacer le bourg de Saint-Sauveur, rien que ça, qui était initialement au même niveau que le château, vers le bas de la colline, pour le remplacer par une esplanade (dite "parc d'Auguste") et avoir une belle vue, où il a planté une obélisque portant cette inscription :


Conserve ma devise, elle est chère à mon coeur ;
Les mots en sont sacrés ; c'est l'amour et l'honneur.

Les colonnes de marbre de la seule façade restée à peu près en état.


Il a été saisi pendant la Révolution. En 1793 le riche mobilier fut vendu et le château pillé par la population et par les militaires. Il fut transformé en hôpital, puis en caserne, et finalement mise aux enchères en 1798 : les bâtiments étaient alors "délabrés et dévastés, sans couverts, ni portes, ni fenêtres". Il fut acheté par Mathieu Barbaroux, qui le laissa en l'état, à l'abandon. Il a finalement brûlé en 1799, et il ne subsiste aujourd'hui plus que les ruines du château au plus original jardin de Provence. Courte vie donc, pour ce palais des plaisirs.


De l'oseille (?) sur l'esplanade au pied des colonnes.


Vue du bord Est de l'esplanade : un petit goût de Rio... avec un océan de verdure.


Puis on redescend du château dans le village, près de la "rue de la Révolution". On monte vite fait dans la voiture, brusquement affolés par la présence de curieuses bêtes sauvages qui nous entourent.


Un animal sauvage et menaçant.


Filons vite, c'est peut-être dangereux !


Un second animal sauvage, peut-être venimeux, qui sait ?


On se dirige vers un autre monument du village : la chapelle Notre-Dame, reconstruite au XIXe siècle, située sur une autre colline un peu plus loin, là où il y avait l'ancien bourg de Seysson, l'un des deux qui a depuis disparu, remplacé aujourd'hui par une ribambelle de maisons en crépi rose entourées de lauriers, de piscines, de grillages et de portails automatiques.


La chapelle Notre-Dame.


Vraisemblablement, elle est à l'abandon : les vitraux sont brisés, les plantes commencent à reprendre leurs droits sur les constructions. Il y a une table en pierre dans un jardin sous un gros arbre à l'ombre fraîche, quelques statues. Les genêts en fleurs sentent fort.



Puis on prend l'un des chemins qui part de Notre Dame et se dirige vers la chapelle de Saint Probace, un peu plus au sud encore. Sur la route, tout plein d'orchis pyramidaux (anacamptis pyramidalis).


Orchis pyramidal (anacamptis pyramidalis).


Le genre anacamptis (qui s'oppose aux orchis et ophrys qu'on avait vus précédemment) tire son nom du grec anakamptein, qui signifie "courbé vers l'arrière", ou quelque chose dans ce gout-là : à mon sens ça viendrait de l'éperon des fleurs qui est courbé vers le bas... mais ça reste à vérifier, d'abord parce que je ne sais pas si c'est valable pour tous les réprésentants du genre. D'après la Wik, les plantes du groupe anacamptis se distinguent des orchis par le fait que les trois sépales sont fusionnés à la base... mais les fleurs sont tellement petites que c'est diffile à reprérer ! Et puis ça me paraît bizarre.



Ensuite, on prend la direction de Mazaugues. Sur la route, petite pause devant une maison abandonnée le long d'un champ de blé. Encore des orchis pyramidaux, partout : des plus ou moins grands, des plus ou moins fleuris, des plus ou moins clairs, il faut même regarder où l'on met les pieds pour ne pas marcher dessus.


Anacamptis pyramidalis aux fleurs disposées en spirale.


Dans un ancien champ, des stipes à feuilles pennées (stipa pennanta, merci donna !).


Stipes à feuilles pennées.


Et puis dans un sous-bois, j'ai manqué de poser mon pied sur un ophrys bécasse, tout seul coincé sous une dense toile d'araignée, et à l'ombre (alors que jusqu'à présent je n'en avais vu que groupés sous le soleil des garrigues).


Ophrys bécasse (ophrys scolopax).


les fraisiers des bois sont en fleurs.



9 Commentaires :

Anonyme a dit...

magnifique cette balade; je ne connaissais pas ce chateau. peux tu rechercher pourquoi, quand on monte dans la colline au dessus de l'abbaye de Montrieux ( entre Sollies Toucas et Belgentier) on trouve ces magnifiques aiguilles de Valbelle ( encore eux) que tu as escalad�es avec ta classe et la mienne il y a quelques annees ( il y avait ta copine Anne et le gros p�re Lang et Sibille (il vient de mourir) .j'ai une photo de cette balade. Ma parole les Pieresc et les Valbelle poss�daient toute la region.
tu as l'art de degoter de magnifiques orchid�es... chapeau bas.

Donna a dit...

mirza, la plante jaune, c'est pas le (la?) paliure "épine du Christ" ?

Donna a dit...

La graminée c'est je crois stipa pennata que j'ai croisée ici moi aussi

jimex2nim a dit...

je n'imaginais découvrir un tel "lieu de mémoire". Les photos donnent du rythme & comme un suspens à la narration, avec vous les offices du tourisme ne sont plus nécessaires. Pro!

Mimille a dit...

"peux tu rechercher pourquoi, quand on monte dans la colline au dessus de l'abbaye de Montrieux ( entre Sollies Toucas et Belgentier) on trouve ces magnifiques aiguilles de Valbelle (...)"

--> Je vais chercher, mais oui ça a évidemment un lien c'est certain. Le Valbelle qui a refait le château de Tourves, il avait fait faire sa sépulture à Montrieux. D'ailleurs, l'une des statues de la sépulture a été ensuite donnée à la Sainte Baume, et fait aujourd'hui office de Ste Marie Madeleine... alors qu'à la base c'était censé être un portrait de l'une de ses maîtresses ;-)

"Ma parole les Pieresc et les Valbelle poss�daient toute la region."

--> Non, il y avait d'autres familles aussi, les Pontevès, les Glandevès, les Varages... presque autant de noms de villages, aujourd'hui :-)

Donna : "mirza, la plante jaune, c'est pas le (la?) paliure "épine du Christ" ?"

--> Ça y ressemble beaucoup oui, mais ce que j'ai trouvé est plus petit je crois. Je vais chercher plus avant. Merci :-)

"La graminée c'est je crois stipa pennata que j'ai croisée ici moi aussi"

--> Ah oui, c'est ça ! Merci merci !! J'ajoute ça dans le billet.

JM : "je n'imaginais découvrir un tel "lieu de mémoire". Les photos donnent du rythme & comme un suspens à la narration, avec vous les offices du tourisme ne sont plus nécessaires. Pro!"

--> Waou, merci beaucoup ! Bah, c'est juste quelques recherches... et puis j'avoue que j'aime beaucoup mon pays, y'a pas à dire, ça aide ;-)

Anonyme a dit...

Le premier arbuste, de ta serie de photos, pres du chateau,qui donne de droles de fleurs-feuilles (vert clair) je pense que c'est de "la monnaie du pape" en herbe; plus tard ca va secher puis ca devient argente, dore, comme de pieces de monnaie.
J'ai regarde sur une carte; en fait Montrieux et Tourves se rejoignent par la meme chaine de montagnes ( c'est elles qu'on appelle les aiguilles de Valbelle) ; en fait c'est curieux, car naturellement elles constituent comme des ruines de chateaux ou autre... cela a du inspirer autrefois les Valbelle a constuire un chateau. a verifier.;-)

Mimille a dit...

Non, ce n'est pas non plus de la monnaie du pape... c'est plus petit cette fois. Quel mystère !

Anonyme a dit...

Le deuxieme animal qui etait dessine dans la pierre est un hippocampe ( ou petit cheval de mer) on en trouve parfois sur nos plages et on peut les faire secher.

Mimille a dit...

Oh, sans blague ! ;-)