dimanche 30 septembre 2007

La femme squelette

Il me travaille, ce bouquin. Je vois bien que mes rêves sont empreints de l'acceptation lente de ce que j'y lis et qui déchire mon regard dans mes journées, qu'ils expriment avec leurs cris propres ce que je n'ose faire éveillée. Ces jours-ci c'est La femme squelette qui retient mon attention (voir ici). En voici deux extraits qui m'ont particulièrement marquée.


Dame Mort poursuit l'homme sur l'eau et sur la terre ferme, elle franchit la frontière entre l'inconscient et la masse solide, consciente, de l'esprit. La psyché consciente se rend compte de ce qu'elle a pêché et tente désespérément de le semer. Nous faisons cela sans arrêt dans notre vie. Quelque chose de terrifiant commence à émerger. Nous n'y prêtons pas attention et nous continuons à mouliner, pensant qu'il s'agit d'une prise. C'est un trésor, certes, pas du type que nous avions imaginé, mais plutôt du genre qu'on nous a malheureusement appris à craindre. Nous essayons alors de nous enfuir ou de le rejeter, ou de l'embellir, en faisant comme s'il s'agissait d'aute chose. Mais cela ne fonctionne pas. A un moment ou à un aure, nous devrons embrasser la sorcière.


Et puis plus loin :


La justice des contes de fées, comme celle de la psyché profonde, récompense la bonté à l'égard de ce qui semble inférieur et punit le refus de faire du bien à qui n'est pas beau. Il en va de même dans les grands sentiments, tels l'amour. Quand nous nous ouvrons et touchons le pas-beau, nous sommes récompensés. Lorsque nous le refusons, nous sommes coupés de la vie et laissés dans le froid.

Pour certains, il est plus facile d'avoir de belles pensées élevées, et de toucher les choses qui nous transcendetn littéralement, que de toucher ce qui n'est guère positif et lui approter aide et assistance. Il est encore plus facile, comme le montre le conte, de rejeter le pas-beau et de se sentir à tort dans son bon droit. C'est le problème qui se pose avec le Femme Squelette.

Qu'est-ce que le pas-beau ? Notre propre faim d'amour secrète est le pas-beau. Notre mauvais usage de l'amour est le pas-beau. Nos écarts en matière de loyauté et de dévotion ne sont pas jolis, notre sens de la séparation de l'âme est ingrat, nos verrues psychologiques, nos insuffisances, malentendus, fantasmes infantiles sont le pas-beau. En outre, nos cultures considèrent que le pas-beau, c'est la nature de Vie/Mort/Vie, qui donne naissance, détruit, incube et donne à nouveau naissance.

Désenchevêtrer la Femme Squelette, c'est comprendre cette erreur conceptuelle et la réparer. COmprendre que l'amour n'est pas un lit de roses. Trouver du réconfort, plutôt qu'avoir peur, dans l'obscurité régénératrice. C'est mettre du baume sur les vieilles plaies. C'est changer notre façon de voir et d'être, afin de refléter l'épanouissement plutôt que le dépérissement de l'âme.

Pour aimer, il faut toucher la femme fondamentale, toute en os et pas-vraiment-belle, en dégageant pour nous-même le sens de la nature de Vie/Mort/vie, en la remettant en place, en lui permettant de vivre de nouveau. Il ne suffit pas d'amener l'inconscient à la surface, ni même de le traîner par accident jusqu'à la maison. Le craindre ou le mépriser pendant longtmeps arrête la progression de l'amour.

Désenchevêtrer la Femme Squelette, c'est commencer à rompre le charme -- autrement dit la crainte d'être consumé, anéanti à jamais.


Je n'ai même pas fini de lire ce chapitre. Je prends mon temps, je savoure, je m'arrête à toutes les pages, relisant les paragraphes précédents, fermant le livre et revoyant ce que j'ai lu, ce que j'ai aperçu, laissant mon esprit divaguer sur ces mots. Non que je me sente en phase totale avec ce que je lis, mais tout ça me travaille et me fait réagir. C'est très vivant comme lecture, très intense, très corporel. J'aime beaucoup.


Les illustrations de ce billet viennent de Neige tardive, qui est un projet de film d'animation basé sur le conte, réalisé par Sarah Van Den Boom.

2 Commentaires :

Anonyme a dit...

Bonjour, je suis Sarah Van Den Boom!! J'ai trouvé votre blog en tapant mon nom sur Google (c'est parfois instructif!)Je vous remercie de divulguer ces illustrations -qui ont trouvé ici leur place car mon projet de film a évolué, l'ambiance a changé, je n'utiliserai finallement pas ces visuels...
Mon film (qui s'appelle maintenant "La femme squelette") entre en production lundi prochain avec une équipe de brillants animateurs Lillois, il devrait être fini bouclé dans un an... eh oui, c'est loooong l'animation!
J'aime beaucoup vos écrits et vos interrogations. Je vais continuer à farfouiller dans votre blog et y mettre un petit lien dans mon navigateur. Bonne continuation!!!

malie a dit...

Sarah > Waou, je suis enchantée !! Comme quoi ça sert, d'aller chercher des trucs sur Internet :-)

Je suis ravie d'apprendre que le film prend forme. Et ravie aussi que mon blog te plaise !

Au plaisir de te lire :-)